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Le tirage au sort des terres était encore si généralement en usage en Allemagne au moyen âge, que des documens silésiens du XIIIe siècle, cités par M. Meitzen, appellent cette coutume mos theutonicus. La collection des lois danoises, réunie vers le milieu du même siècle, par le de la répartition des terres par la voie du sort comme d’une coutume généralement suivie. Dans beaucoup de villages anglais, on trouve encore des prairies divisées en lots qui chaque année sont tirés au sort entre les co-partageans. On les appelle lot meadows et lammas land. Plus rarement des parts de terre arable passent successivement de l’un à l’autre, et pour ce motif on les nomme shifting severalties. Il n’est pas rare non plus qu’un groupe de cultivateurs prennent à bail une terre dont ils occupent tour à tour chaque partie : c’est la coutume connue sous le nom de run-ring. Parfois la répartition se fait non par la voie du sort, mais d’après un roulement déterminé une fois pour toutes. Quand le foin est coupé et enlevé, la vaine pâture reprend ses droits, et tous les habitans viennent abattre tumultueusement les clôtures qui ont été élevées : c’est un jour de fête et de réjouissances publiques qu’on appelle lammas day. D’après M. Dareste de La Chavanne, la tradition des partages égaux de certaines portions du sol s’est toujours conservée en France. Ainsi, chaque fois qu’il s’est formé au moyen âge une colonie agricole nouvelle, on y retrouve l’ancien système communal. On a un exemple curieux de ce fait dans une concession accordée par l’abbaye de Saint-Claude aux habitans de Longchaumois : des hommes experts élus à cet effet devaient répartir aux jeunes gens les terres auxquelles ils avaient droit.

M. Maine cite, d’après un document communiqué au parlement anglais, un exemple d’organisation agraire qui reproduit exactement les caractères des anciennes communautés de village des époques primitives. Le bourg. de Lauder en Écosse possède un communal d’environ 1,700 acres. D’autre part, il existe sur son territoire 105 portions de terre nommées burgess acres (parts des bourgeois). Celui qui possède une de ces parts a droit à la jouissance d’un cent cinquième du communal. Un septième de la superficie cultivable est successivement livré chaque année à la charrue, et à cet effet partagé entre les propriétaires des 105 burgess acres. On décide d’abord quelles parties du territoire commun seront mises en culture ; celles-ci sont ensuite divisées en lots qui sont tirés au sort entre les ayant-droit. Le conseil communal ayant amélioré au moyen de routes et de drainage les terres situées sur les hauteurs, il y perçoit un impôt spécial et en règle la culture. La partie du communal qui n’est pas cultivée devient une pâture sur laquelle chaque bourgeois a le droit d’envoyer deux vaches et quinze moutons. Comme le