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de doctrine, une thèse, — et la pente de son esprit est de courir précisément là où il en peut trouver, — il commence par citer les opinions diverses, les différens systèmes des savans français ou étrangers qui se sont appliqués aux mêmes problèmes. Ainsi, dans le volume qui nous occupe, voulant rechercher si le temple grec a eu pour modèle la primitive maison ou cabane de bois, ou bien si l’origine de l’architecture grecque doit être considérée comme double suivant la double nature des matériaux qui s’offraient, il soutient, quant à lui, la première opinion, et il établit des analogies primordiales entre le temple antique et les cabanes en bois de la Lycie ; toutefois ce n’est pas sans avoir exposé et groupé autour de son propre avis celui de Vitruve et des grands artistes de la renaissance, Brunelleschi, Alberti, Bramante, Giocondo, Peruzzi, San Gallo, Vignole, Serlio, Palladio, celui de Quatremère et de l’Allemand Hirt ; ce n’est pas sans avoir fait connaître et combattu celui de M. Viollet-Le-Duc et des Allemands Hübsch, Klenze, Semper, qui lui sont opposés. On comprend comment cette manière largement érudite d’examiner les questions les étend et les féconde : les vues naissent les unes des autres, les aperçus se multiplient, la lumière générale se condense et devient foyer.

Après avoir traité des origines de l’architecture sacrée en Grèce, M. Hittorff a de curieux chapitres sur l’ordonnance et la construction des temples, sur l’usage primitif des portiques pour la réunion des citoyens, sur la séparation ultérieure des réunions religieuses et profanes. Le premier temple a été certainement l’ædicule ; on y a bientôt adossé les promenoirs, qui deviendront les portiques : ils recevront les citoyens pendant les cérémonies religieuses, et serviront aussi à leurs ébattemens profanes tant que la naïveté des croyances le permettra. Plus tard, afin d’établir une démarcation entre les deux élémens profane et religieux, on ajoutera sur le devant des avant-porches ou ptéromas intérieurs. Le portique entourant les quatre côtés du temple servira aux réunions publiques ; dans l’avant-porche, on viendra prier et sacrifier aux dieux. En même temps, la disposition intérieure du sanctuaire deviendra plus complexe, en vue d’une séparation toujours plus grande entre les services publics et religieux. Un peu plus tard encore, quand la religion, pour ne pas perdre de son influence, croira devoir s’entourer d’une pompe mystérieuse et se séparer des agitations profanes de la vie politique, quand les portiques seront insuffisans a recevoir les citoyens devenus plus nombreux, on en arrivera à rendre plus difficile l’accès des ptéromas en remplaçant sur trois côtés les marches par des socles, puis à rétrécir la largeur des portiques, et à bâtir, à distance, des édifices spécialement destinés aux réunions des citoyens, des basiliques, des forums, etc. Si les pontifes et les chefs politiques durent craindre à certains égards de voir la foule affluer trop nombreuse vers les acropoles et autour des temples qui contenaient soit les idoles,