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ici question doit être considérée comme une disposition financière dont il nous sera loisible de profiter, et non comme une aggravation de l’occupation territoriale. D’un autre côté, il ne faut pas perdre de vue que par le paiement de 500 millions seulement la France obtient la libération de la Marne et de la Haute-Marne, qui selon les premiers traités auraient pu demeurer sous le drapeau allemand jusqu’en 1874. Ainsi libération certaine de deux départemens vingt mois avant la date primitivement fixée et faculté de faire cesser, non-seulement à la date de 1874, mais encore à une date plus rapprochée, l’occupation du reste, voilà quelle est au fond la solution donnée par le traité de Versailles à la question territoriale. En d’autres termes, la durée de l’occupation est désormais subordonnée à nos moyens de paiement De plus, les négociateurs ont eu soin de rappeler l’éventualité prévue par les préliminaires de paix pour le cas ou l’Allemagne accepterait la substitution d’une garantie financière, ils ont même fixé la période à laquelle il est présumable que cette éventualité doit se réalise, en attribuant à la France l’initiative de la proposition.

Il ne faut pas croire que, si l’on avait conservé dans le texte du traité l’ancienne date du 1er mars 1874 pour le paiement intégral des 3 milliards et par suite pour la libération complète du territoire, cette double opération aurait pu s’accomplir » L’évacuation graduelle n’étant pas alors stipulée, la France n’aurait eu aucun intérêt à payer par anticipation une partie quelconque de sa dette, et comment aurait-elle versé en un seul jour et à l’heure dite la somme de 3 milliards ? Comment l’aurait-elle recueillie et conservée au moins pendant quelque temps en vue d’un paiement unique ? L’Allemagne aurait eu le droit de ne se dessaisir du gage qu’après avoir encaissé la totalité de sa créance, et, par l’effet de ces retards inévitables, nos six départemens seraient demeurés sous l’occupation des troupes allemandes fort au-delà du 1er mars 1874. Le traité de Francfort, en assignant une seule date pour un paiement aussi énorme, ne pouvait être exécuté selon sa forme et teneur, et l’état de choses que tous nos vœux, tous nos efforts tendent à faire cesser au plus tôt se serait nécessairement prolongé.

Ce qui était impraticable sous le régime des anciennes conventions est devenu possible avec la convention nouvelle. Le créancier et le débiteur se sont rapprochés pour diviser les paiemens. D’après le règlement de compte qui vient d’être arrêté à Versailles, la dette est partagée en quatre termes, et, si la France s’engage à verser l’un des 3 milliards avant 1874, elle obtient en retour la faculté de ne verser le dernier milliard qu’un an après cette date, tout en se réservant la faculté d’anticipation avec ses conséquences. La