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caractère vague qui les fait plus difficiles à combattre, mais qui en rend l’explosion moins sauvage. Désormais les rivalités de clocher, les haines locales, n’engendreront plus de soulèvemens ; le communier est devenu citoyen, et sur le beffroi de la maison de ville flotte le drapeau de la grande patrie. En reconnaissant les droits de l’homme et du citoyen, l’assemblée nationale a couronné le travail séculaire qui, élevant sans cesse la commune, finit par l’associer aux destinées de l’état. En installant leurs institutions au faîte du pouvoir central, les communes ont abdiqué au profit de la nation.

L’organisation communale est aujourd’hui ce que l’ont faite les longs efforts de la royauté et les conceptions énergiques de la révolution. Les législateurs de 1789 et de l’an VIII se sont montrés, en ce qui concernait la puissance de l’état, les vigoureux continuateurs de l’œuvre de la monarchie. Ils ont donné la solution du problème qui était posé depuis des siècles entre le principe de l’indépendance communale et celui de la souveraineté de l’état, avec cette fermeté de logique et cette lucidité qui semble devoir rester le privilège exclusif des hommes de cette époque.

A l’état devait appartenir dans la vie publique le soin des intérêts généraux de la vaste association nationale. Aux communes, déchues de leur premier rôle, mais associées plus intimement au sort de la patrie, devait rester la direction des intérêts confinés dans les limites étroites de l’association communale. Laissés complètement indépendans pour accomplir les actes qui constituent la gestion des biens communaux, les conseils municipaux virent leurs décisions soumises au contrôle de l’état chaque fois qu’elles intéressaient là fortune publique ou engageaient l’avenir. Le décret du 14 décembre 1789, qui établit cette distinction fondamentale, a été presque entièrement reproduit dans la loi du 18 juillet 1837 ; il n’en différait guère que par un point en faisant exercer le contrôle de l’état par le conseil du département au lieu de le remettre aux mains des représentans de l’état. Cette anomalie disparut dans la constitution de l’an VIII ; mais elle est fort intéressante à signaler parce que nous retrouverons la même prétention dans les nouveaux projets de lois. C’est au même titre que nous rappellerons la constitution de l’an III, dans laquelle ces mêmes projets de lois ont cherché la plupart de leurs inspirations. Ce rapprochement est d’autant plus curieux que les époques offrent plus d’analogie, et que le système aujourd’hui préconise a déjà subi une première expérience. Nous disons qu’il y a de l’analogie entre les époques ; qui ne serait frappé en effet des traits communs que peut offrir l’état présent de la France et celui où la trouva le directoire ?