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air belliqueux plurent au prince à défaut de sa conversation, et non-seulement Théodose voulut qu’il assistât au concile, mais encore qu’il y pût voter, ce qui n’appartenait jusqu’alors qu’aux évêques. Effectivement, quand les abbés et autres personnages monastiques souscrivaient les actes d’un synode auquel ils avaient assisté, ils le faisaient en qualité d’assistans ou témoins, et non en qualité de juges. La chose était donc nouvelle et pouvait rencontrer des oppositions ; l’empereur en écrivit particulièrement à Dioscore, qui promit de tout arranger, car il entrevoyait déjà dans ce sauvage un auxiliaire précieux. Barsumas ne se séparait pas plus de ses moines que les patriarches d’Alexandrie de leurs parabolans, et Dioscore savait quel poids pouvaient apporter ces respectables cortèges dans la balance d’un concile d’Orient.

Le choix de la ville d’Éphèse, théâtre de la défaite de Nestorius, s’il était dû à l’influence d’Eutychès, comme on peut le supposer, indiquait de la part de ce moine et de son filleul Chrysaphius le dessein d’étendre la persécution sur les catholiques modérés, que les fanatiques du parti adverse taxaient de nestorianisme. Le sage pape Léon, dans la prévision de ce qui allait se passer, n’avait approuvé finalement la réunion d’un concile œcuménique qu’à la condition qu’il se tiendrait à Rome, et Pulchérie était de cet avis ; mais l’empereur passa outre, et Léon céda pour éviter le mal plus grand encore d’une rupture. Inquiet de tout ce qu’il voyait, et décidé néanmoins à se faire représenter au concile, il voulut limiter les pouvoirs de ses légats, et ces limites, il les fixa lui-même par une lettre adressée à la future assemblée. Il y exposait la croyance de l’église romaine concernant le mystère de l’Incarnation, et n’autorisait la coopération de ses légats aux actes et aux travaux du synode qu’autant que la profession de foi des évêques réunis se trouverait conforme à la sienne. En cas de dissidence, les légats devaient se retirer. Il choisit pour cette délicate mission des hommes habiles et sûrs, à qui le courage ne manquerait pas ; ils étaient quatre : Jules, évêque de Pouzzoles, chef de la légation ; Hilaire, diacre de l’église romaine et pape lui-même un peu plus tard ; le prêtre René et Dulcitius, prêtre et notaire, sur les notes duquel les légats devaient rédiger leur rapport. On voit qu’en fait de mesures prudentes le pape Léon ne négligeait rien. Sa lettre est si célèbre dans l’histoire, et le rôle qu’elle jouera dans la suite de nos récits est tellement important, que nous en reproduirons ici les principaux passages.

« Le symbole de Nicée, y était-il dit, suffit pour ruiner toutes les machines des hérétiques, car, en professant que le Dieu tout-puissant et éternel est père, on professe en même temps que son fils lui est co-éternel, consubstantiel et entièrement semblable. Or