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ville d’Éphèse, et c’était un patriarche d’Alexandrie, Dioscore, que l’empereur désignait pour la présider.


IV.

À voir la succession des patriarches d’Alexandrie » on eût pu se dire que l’Egypte était toujours la terre chérie de la métempsycose sous la loi du Christ comme au temps de Knef et d’Osiris. Cyrille avait succédé à Théophile, Dioscore à Cyrille ; mais c’était toujours la même âme dans des personnages différens, le même esprit de discorde, de domination, de violence, les mêmes instincts de cruauté et d’avarice. S’il y avait quelque dissemblance entre eux, c’est, que Dioscore surpassait ses prédécesseurs en méchanceté. Cyrille était le neveu de Théophile, Dioscore ne leur était point parent ; mais il avait vécu de longues années près du premier en qualité d’archidiacre et puisé dans son exemple la tradition de ces évêques tyrans qu’un saint d’Egypte comparait aux Pharaons. Dioscore devait toute sa fortune à Cyrille, dont les bienfaits avaient préparé son élévation, et, à peine monté sur le trône des patriarches, il persécuta la famille de son bienfaiteur. Le testament de Cyrille chargeait son successeur, quel qu’il, fût, de remettre à ses frères et sœurs, qu’il aimait, une forte somme d’argent sur l’ensemble des biens dont il l’instituait héritier. C’était un fidéicommis, sacré pour les consciences les moins timorées : Dioscore s’en saisit et ne voulut plus le rendre. La famille le poursuivit en, justice, il effraya les juges ; elle en appela au tribunal de l’empereur et partit pour Constantinople : Dioscore acheta le ministre en faveur, l’eunuque Chrysaphius, cet homme corrupteur et corrompu qui trafiquait de tout, et entre eux se forma par la complicité du vol une association néfaste dont l’Egypte gémit longtemps. Chrysaphius en effet, pour tenir sous sa main les affaires de l’église, avait besoin d’un instrument puissant tel qu’un patriarche d’Alexandrie, et récompensait cet instrument par l’impunité la plus scandaleuse. Les parens de Cyrille furent les premières victimes de cette alliance. Ils étaient à peine débarqués à Constantinople qu’ils furent, emprisonnés, dépouillés de ce qu’ils avaient et obligés de regagner l’Egypte, où la vengeance de Dioscore les ressaisit. Les infortunés y périrent presque tous, et nous verrons plus tard ceux qui purent échapper venir demander à un concile dans les termes les plus déchirans la justice qu’un ministre prévaricateur leur déniait.

Dioscore nous est représenté par l’histoire comme un dévastateur de provinces. Ses tournées épiscopales étaient redoutées à l’égal d’une invasion des Maziques et des Blemmyes ; les populations émigraient sur son passage, car il trouvait toujours des prétextes pour