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comme sympathiques à Napoléon : nous n’avons jamais aimé cet empereur, quia criminellement attaqué l’Autriche, livré Maximilien à ses bourreaux, laissé s’accomplir cette honteuse spoliation des états du saint-père, et qui n’a entretenu à Rome une poignée de soldats que pour son avantage personnel. » À cette époque, le parti romain déclarait déjà qu’il n’éprouvait aucune répugnance à voir la couronne impériale sur la tête du roi de Prusse, a Le roi Guillaume a donné des preuves si évidentes de religiosité que nous ne craignons pas de sa part une politique hostile à l’église. Le comte de Bismarck lui-même ne nous inspire plus d’inquiétudes; lors des débats sur la peine de mort au Bundestag, il a montré que la carrière diplomatique n’avait point détruit en lui le sentiment profond d’une conception véritablement religieuse (einer ernst religiœsen Weltanschauung). »

Le parti catholique romain appuie encore sur d’autres élémens ses espérances. A ses yeux, la réaction religieuse dans les pays de la réforme est une des causes qui doivent paralyser le mouvement des vieux catholiques. Le protestantisme dans le nord de l’Allemagne, sous la direction d’un empereur-évêque, a perdu une partie notable de son caractère libéral : l’église évangélique orthodoxe ne saurait désormais attirer à elle les demi-libéraux du sud, qui hésitent entre Rome et la libre pensée. Le principe du protestantisme, qui avait conservé jusqu’à ce jour un caractère essentiellement international, peu différent peut-être de la raison progressive, s’est aujourd’hui transformé en une divinité prussienne. Une lutte religieuse entre Rome infaillible et Berlin orthodoxe ne saurait plus soulever une question de principes; elle créerait simplement une division entre princes. A cet égard, les catholiques ne paraissent point redouter dans le roi un second Henri VIII. De même qu’en Autriche les jésuites se sont autrefois faits de cour, afin que l’empereur fût d’église, de même à Berlin un empereur piétiste ne saurait alarmer l’épiscopat romain. Au mois d’avril 1871, l’ultramontanisme affirmait dans ses écrits que les catholiques n’oublieraient jamais que le roi de Prusse, dans son discours du trône du 15 novembre 1867, avait promis «de faire tous ses efforts pour satisfaire aux réclamations de ses sujets non protestans, relativement à la dignité et à l’indépendance du chef de l’église. »

Le rapprochement des ultramontains avec la cour de Prusse repose sur d’anciens antécédens. La réaction féodale a été secondée par le clergé catholique, aussi bien que par l’orthodoxie protestante. Tandis que le « parti de la croix » flattait le piétisme du roi de Prusse et parvenait par cette voie à rentrer en possession de ses anciens droits seigneuriaux, le parti catholique encourageait de