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le commerce et leurs droits civils, seront réglés aussi favorablement que possible, lorsque seront arrêtées les conditions de la paix définitive ; il sera fixé à cet effet un espace de temps pendant lequel ils jouiront de facilités particulières pour la circulation de leurs produits. » Provisoirement on organisa d’un commun accord un régime spécial, d’après lequel les produits de l’Alsace-Lorraine devaient, pendant six mois, expirant le 1er septembre 1871, être admis en France avec exemption de droits moyennant l’exhibition de certificats d’origine délivrés par des syndicats d’honneur, qui étaient composés d’industriels alsaciens et lorrains, et qui fonctionnaient sous le contrôle de la douane française. Il importait en effet que les facilités accordées exclusivement aux territoires cédés ne profitassent pas aux pays allemands. Lors des négociations de Francfort, au mois de mai, l’on s’occupa de régler cette question à titre définitif, selon le vœu de l’article 3 du traité du 26 février. Les négociateurs allemands proposèrent d’abord que les produits de l’Alsace-Lorraine fussent reçus en France sous un régime de faveur pendant un délai de six années ; mais cette proposition fut ajournée, parce que la prolongation du terme paraissait excessive. Cependant cet ajournement ne pouvait être indéfini, car le premier délai accordé en février allait expirer le 1er septembre ; les représentans de l’Alsace étaient en instance tout à la fois à Versailles et à Berlin pour que l’on tranchât dans le sens le plus libéral la difficulté douanière. Ce fut alors que l’on eut la pensée de rattacher le règlement de cette question délicate à un traité qui aurait pour objet principal l’évacuation anticipée de six départemens. Après discussion, l’on convint que les produits manufacturés de l’Alsace-Lorraine seraient admis en franchise sur le territoire français jusqu’au 31 décembre 1871, moyennant le quart des droits du 1er janvier au 1er juillet 1872, moyennant la moitié des droits du 1er juillet 1872 au 1er juillet 1873, et que, par réciprocité, les. articles français nécessaires à l’industrie locale seraient admis dans l’Alsace-Lorraine sous des conditions analogues. Au lieu du délai de six ans, qui avait été demandé à Francfort pour le maintien d’un régime de faveur, il ne s’agissait plus que d’un terme de vingt-deux mois, à l’expiration duquel les tarifs ordinaires deviendraient applicables de part et d’autre.

Les deux gouvernemens avaient ainsi préparé les bases de la convention douanière ; mais le cabinet de Berlin, tout en consentant à l’évacuation immédiate de six départemens, exigeait des garanties, non-seulement pour le paiement des 500 millions de l’indemnité à l’échéance du 1er mai 1872, mais encore pour l’acquittement de 150 millions, représentant l’intérêt des trois derniers milliards et