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transaction. A chacun des deux mandats était jointe une lettre à l’empereur. Celle des Orientaux conjurait le prince par tout ce qu’il y a de plus saint au monde de porter son attention sur les anathématismes, dont ils le faisaient juge, et d’obliger le parti adverse à les discuter avec eux en sa présence et par écrit, deux doctrines contradictoires ne pouvant être tolérées dans la foi. La lettre des cyrilliens se bornait à demander la délivrance de leurs deux chefs et la permission pour eux-mêmes de retourner dans leurs églises, dont ils étaient prives depuis trop longtemps. Comme pour bien accuser la division des partis, les deux députations se mirent en route par des voies différentes : les cyrilliens prirent la route de mer, tandis que les Orientaux suivaient celle de terre, la plus longue de beaucoup, et perdaient même en chemin un de leurs compagnons, Himérius de Nicomédie, que la fatigue du voyage forçait de s’arrêter dans sa ville épiscopale. Lorsqu’ils arrivèrent au rendez-vous, les cyrilliens étaient maîtres de la place.

Nestorius cependant, toujours gardé à vue dans Éphèse, recevait de son ancien ami le préfet du prétoire Antiochus un billet que nous avons encore. Il y était dit que l’empereur, prenant en considération le désir manifesté par l’archevêque d’aller vivre dans la solitude, l’autorisait à quitter Éphèse, et qu’afin de lui épargner dans le voyage tout désagrément et tout souci, on lui donnait des gardes pour le servir, — qu’il choisirait lui-même le lieu de sa retraite et la route qu’il lui plairait de suivre ; les transports de l’état et les mansions publiques seraient mis à sa disposition. Il comprit fort bien que c’était un arrêt d’exil, et il désigna le monastère d’Euprèpe, où s’étaient écoulés les premiers temps de sa vocation religieuse. Tombé de si haut et si soudainement, l’archevêque ne fléchit point sous ce dernier coup que lui portait la main d’un ami ; il répondit que « c’était à ses yeux un honneur d’être déposé pour la foi, qu’il avait néanmoins une grâce à solliciter de l’empereur : c’était que le religieux prince daignât condamner par une lettre publique les dangereuses propositions de Cyrille, et que cette lettre fût lue dans toutes les villes de l’empire. Nestorius alors partirait satisfait, il aurait rempli son suprême devoir envers l’église. » Tandis que l’ancien patriarche de Constantinople recevait dans cette forme la liberté de l’exil, Cyrille était toujours en prison, et si étroitement gardé que des soldats couchaient en travers devant la porte de sa chambre. Quant à Memnon, l’histoire ne nous en dit plus rien, et ce triste personnage ne mérite guère qu’on parle de lui.

L’empereur avait d’abord désigné Constantinople pour l’endroit de la conférence ; puis, sur quelques signes de fermentation, soit