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actes de sa condamnation, afin que ceux-ci pussent les confirmer et les signer. Il est à remarquer qu’en les signant les représentans du pape déclarèrent le faire en exécution de la sentence prononcée par lui contre l’archevêque avant la convocation du concile, comme si l’assemblée n’eût fait elle-même qu’homologuer une décision du siège de Rome. Cyrille ne tint pas un autre langage que les légats. « C’est juste, c’est juste ! criaient les évêques ; le jugement est juste ! » Cet effacement de la souveraineté d’un concile n’amena aucune observation dans le sein de l’assemblée. Il en avait fallu bien moins autrefois pour soulever dans les conciles d’Orient de vraies tempêtes contre les prétentions de l’église romaine ; mais la papauté avait fait de grands progrès depuis le concile œcuménique de Constantinople, et puis dans les conjonctures présentes on avait besoin de son secours contre Nestorius, contre Jean d’Antioche, enfin contre l’empereur lui-même.

Cette première affaire ainsi terminée au gré de Cyrille, il en aborda une autre qui ne lui tenait pas moins à cœur, celle de Jean d’Antioche et des Orientaux, — et, pour donner à l’action qui allait s’ouvrir une plus grande solennité, il transporta l’assemblée de la maison épiscopale dans l’église de Marie. Déjà, comme on l’a vu, un décret de déposition et d’excommunication avait été lancé sur eux par l’assemblée de Cyrille le jour même de leur arrivée ; mais le décret, rendu tumultuairement dans un moment de colère, sans citation ni procédure contradictoire, pouvait être attaqué pour violation des règles canoniques : Cyrille l’avait craint et s’était décidé à reprendre l’affaire à nouveau dans la forme régulière. Il voulait d’ailleurs que la condamnation de Jean et de ses Syriens reçût de la signature des légats la même attestation de canonicité que celle de Nestorius. Il déposa donc dans le concile une plainte où les derniers événemens étaient présentés favorablement pour son parti, défavorablement pour les Orientaux ; Memnon en fit autant avec force expressions violentes et injures. On cita par trois fois Jean d’Antioche à comparaître, et par trois fois il refusa, disant qu’il ne communiquait pas avec des excommuniés. — La condamnation suivit. Jean fut retranché de la communion ecclésiastique, et ses complices menacés de la même peine, s’ils ne venaient à résipiscence. Les légats approuvèrent l’arrêt et y souscrivirent.

Cyrille avait terrassé Nestorius ; mais sa victoire ne lui suffisait pas : il lui fallut poursuivre encore le vaincu jusque dans la personne de son maître, Théodore de Mopsueste. Cyrille haïssait cet évêque, dont la réputation l’offusquait. Il eût voulu le prendre corps à corps, et tenir sous sa main, dans un concile qu’il eût dominé, cette idole des Orientaux pour la briser à son tour sur les ruines de Nestorius ; mais il n’osa point. Le respect dont l’évêque de Mopsueste