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se recrute ce que l’on peut nommer la maistrance de la mine. Les hommes, on l’a vu, sont payés à la journée, mais la journée n’est que de huit heures, et au moyen d’un cumul les salaires de quinzaine peuvent comprendre dix-huit à vingt journées. D’autres immunités de détail s’ajoutent à celle-là, par exemple la réduction de la journée dans un puits où il tombe de l’eau ; toutes les fois que les quantités d’eau sont considérables, les postes sont doublés, afin de permettre aux ouvriers de remonter alternativement au jour. Partout et en première ligne prévaut l’intention de ménager la santé des hommes.

Nous venons de citer l’élite des 9,000 mineurs ; le gros se répartit entre tous les travaux du fond d’une manière inégale et variable. Il y a les ouvriers qui travaillent à la veine, d’autres à l’abatage, d’autres aux galeries, d’autres au rocher, d’autres enfin au herchage ou transport ; presque tous sont payés à la journée, et, suivant les forces et l’habileté, gagnent de 2 fr. 25 à 3 fr. par jour. Dans le nombre sont compris quelques femmes ou jeunes filles dont aucune ne descend dans les puits, et qui, pour un salaire qui va de 50 centimes à 1 fr. 25, sont employées soit à des triages, soit à des chargemens ou déchargemens des bateaux, quelques jeunes garçons également occupés à des travaux de fond ou de jour à raison de 85 centimes, 1 fr. 25 et 1 fr. 50 suivant leur âge et leurs forces, enfin un certain nombre d’hommes faits qui se partagent des services accessoires dont la rétribution moyenne est de 2 fr. à 2 fr. 50 par jour. Si par eux-mêmes ces chiffres n’ont rien de bien significatif, en les additionnant on en reconnaît l’importance, et en les comparant d’année en année on voit combien ils se sont accrus. Le total des salaires, qui en 1847 ne montait qu’à 3,500,000 francs, s’est élevé en 1868 à 9,399,400 francs, dont 7,236,500 francs poulies ouvriers mineurs et 2,153,900 francs pour ceux des autres services, Dans le premier semestre de 1869, la progression ne s’était point arrêtée. Les états de paiement excèdent 10 millions pour l’exercice complet ; c’était le chiffre acquis à la veille de la guerre[1]. D’autres sommes figurent en outre au budget des dépenses d’Anzin, ce sont celles que la compagnie s’impose volontairement. On est fondé à dire que la vie de la contrée tient en partie à l’exploitation des mines, et que, si elle cessait d’être ou souffrait dans une condition essentielle, le vide se ferait. Littéralement la compagnie prend

  1. Pendant la guerre et depuis la guerre, le travail ne s’est point ralenti, même quand les débouchés étaient fermés aux produits. Le chiffre de l’extraction n’est en 1870 inférieur à celui de 1869 que de 600,000 hectolitres, il atteint 18 millions, et les huit premiers mois de 1871 dépassent déjà 12 millions d’hectolitres. On peut évaluer à 20 millions d’hectolitres l’extraction probable de l’exercice courant.