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aboutissent les instrumens de travail. Denain et Vieux-Condé ont quelques ateliers secondaires ; les principaux sont à Anzin. A l’espace qu’ils occupent, au nombre et à la nature des bâtimens, on reconnaît le siège d’une vaste régie. C’était une régie en effet où se résumait le mouvement des services et d’où veillait l’œil du maître. L’objet, au début, était d’avoir tout sous la main et de tout faire par soi-même, machines, matériel des mines, instrumens de précision, outils, charrois, approvisionnemens, et jusqu’à une période assez récente on ne dévia guère de ces erremens. C’est depuis peu que, calculs faits, on s’est aperçu que ce système de régie était plus coûteux que celui de l’adjudication ou de la commande directe, et que des usines spéciales pouvaient fournir beaucoup d’objets à meilleur compte et en meilleure qualité que ne le faisait cette usine générale, qui embrassait trop de choses pour les étreindre toutes avec un succès égal. De là un changement dans divers services : au lieu d’exécuter par lui-même, Anzin ouvre des enchères ou commande au dehors ; les ateliers de constructions neuves ont été en grande partie convertis en ateliers de réparation. Rien pourtant n’y est changé comme aspect ; ce sont les mêmes forges, les mêmes feux d’affineries, les mêmes machines-outils, les mêmes laminoirs, et, comme les besoins à satisfaire se sont accrus, l’activité ne paraît pas moindre.

On retrouve cette activité sur les grands chantiers qu’ouvre incessamment la compagnie, tantôt dans les profondeurs, tantôt à la surface du sol. Au commencement de ce siècle, elle s’est trouvée en présence de deux nécessités, les plus grandes qui aient marqué. son existence, et auxquelles il fallait satisfaire sous peine de déchoir : elle avait à mettre ses fosses d’extraction d’abord en communication entre elles, puis, au moyen d’un bassin collectif, en communication avec une voie fluviale de premier ordre. C’est à ce dernier besoin qu’a pourvu, depuis 1828, un bassin creusé à main d’homme et contigu à la gare de Denain, dont il est le port d’embarquement. Vue du pont de service qui la domine, cette surface d’eau offre un curieux spectacle. Quatre cents bateaux vides ou en chargement sont rangés dans ce petit estuaire qui débouche directement dans l’Escaut et se rattache ainsi d’un côté à la canalisation de la France, de l’autre à celle de la Belgique. Le service entre la gare et le bassin se fait au moyen de machines élévatoires qui accélèrent la besogne tout en ménageant le produit ; des docks pourvus d’une bonne machinerie complètent ces arrangemens économiques. La houille est pour ainsi dire toute portée ; elle change de place et d’élément sans choc, presque sans dépense. Les communications établies à la surface entre les diverses fosses d’extraction fortifient cet ensemble de transports expéditifs et à prix réduits. Dès 1835,