Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 96.djvu/156

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aussi heureux que simple. Les bennes ou cages qui portent les mineurs, à la descente comme à la montée, n’avaient naguère pour point d’appui que le câble et le billot sur lequel il s’enroule. Il s’agissait de leur ménager un autre point d’appui en cas d’accident, Pour cela, on a muni le puits de guides, c’est-à-dire d’un double chemin de bois vertical le long duquel glissent les cages qui portent les hommes de corvée. Le câble se brise-t-il, à l’instant un ressort placé au-dessus de la cage, et que la tension du câble comprimait, se détend. Il commande une double griffe de l’acier le plus résistant, le mieux trempé ; cette griffe ou grappin entre instantanément dans le bois des guides avant même qu’un commencement de descente s’opère, la cage reste suspendue avec sa charge, et l’engin de sauvetage s’est si bien logé dans le bois qu’on a tout le temps nécessaire pour dégager les gens compromis. Il n’est pas d’exemple que ces parachutes aient manqué leur effet, et chaque jour on les perfectionne ; on a obtenu ainsi un moyen de transport commode avec une sécurité presque entière.

Les installations d’Anzin sont donc une œuvre de lente tradition et d’énergie persistante, de sacrifices constans et judicieusement distribués. Les puits d’aérage, presque nuls au début, sont aujourd’hui au nombre de dix-sept et munis d’une énergie telle que chacun d’eux peut extraire 12 mètres cubes d’air par seconde. L’épuisement des eaux du fond se fait par neuf puits au moyen de machines d’une force totale de 700 chevaux. Partout on est arrivé à une grandeur de moyens qui frappe les yeux, à des proportions qui étonnent. S’agit-il de la conversion du charbon en coke, débouché indirect, mais qui tend à devenir de jour en jour plus considérable ? Anzin peut mettre en ligne 700 fours qui produisent 700,000 kilogrammes de coke par jour dans des conditions profitables aux intérêts de la compagnie. Pour un autre produit a lieu une dénaturation analogue. Les menus charbons, résidus de triages successifs, ont le double inconvénient d’avoir une valeur moindre que les autres charbons marchands et d’être en même temps d’un emploi et d’un transport plus difficiles. Pour en tirer meilleur parti, il fallait les soumettre à une manipulation préalable ; c’est ce qui a lieu dans ce que l’on nomme la fabrique des agglomérés. La poussière et le menu du charbon, mélangés de brai liquide, y passent par d’ingénieuses machines qui les transforment en briquettes d’un volume égal et d’un arrimage facile, très recherchées pour les machines à feu de la marine militaire. Dans la croisière qui eut lieu, il y a quelques années, pour comparer les mérites de nos bâtimens cuirassés, ce fut l’aggloméré d’Anzin qui fournit la meilleure marche.

Mais où les proportions de l’établissement se mettent bien en évidence, c’est dans les ateliers de construction d’où partent et où