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pansement, à l’exception de trois qui, un peu en arrière de la ligne de combat, établissent la place de secours.

La place de secours des Autrichiens n’a pas le caractère que nous assignons à une ambulance, les médecins n’y pratiquent que les pansemens indispensables pour éviter une hémorrhagie grave, et rétablissent, s’il est nécessaire, les pansemens provisoires appliqués par les brancardiers. C’est, à proprement parler, le lieu où cesse le transport par brancard, et le rôle des trois médecins est surtout de veiller au transbordement des blessés qu’ils envoient à la place de pansement par les voitures d’ambulance amenées jusqu’à la place de secours. En Prusse, comme en France, il n’y a pas de place de secours, ou plutôt chaque médecin demeuré derrière son bataillon devient le centre d’une sorte de place de secours d’où il dirige le service des brancardiers ; mais en France le médecin, n’ayant pour l’aider que le soldat porteur du sac d’ambulance, ne peut à peu près rien quant au transport des blessés. De ces trois modes d’organisation, quel est le meilleur ? Au point de vue des services chirurgicaux rendus aux blessés, nous n’hésiterons pas à condamner la présence du médecin sur la ligne de bataille, car, aujourd’hui que les troupes engagées se couvrent le plus possible, il ne saurait parcourir cette ligne sans s’exposer outre mesure, et le secours qu’il peut apporter au blessé devient à peu près illusoire, sauf quelques cas rares et exceptionnels. Dans ce qu’il pourrait faire, il peut être remplacé par les brancardiers, s’ils ont reçu une éducation spéciale ; mais, nous objectera-t-on, puisqu’il est utile que les brancardiers soient sur la ligne même du combat, puisqu’ils pratiquent certains pansemens et appliquent des attelles sur les membres fracturés, pourquoi les médecins des régimens ne se chargeraient-ils pas eux-mêmes de ces soins ? C’est que, les médecins étant toujours en nombre insuffisant à la place de pansement, on ne doit pas laisser tous ceux des régimens à peu près inutiles sur la ligne de combat, alors qu’ils seraient si utiles ailleurs ; c’est aussi qu’un bon infirmier se forme en six mois, tandis qu’il faut vingt ans pour faire un médecin, et qu’il faut ménager assez ceux dont on peut disposer. Cependant nous ne saurions accepter complètement le système suivi en Autriche. La présence de quelques médecins sur la ligne de bataille est d’un effet moral incontestable ; elle encourage le soldat, lui inspire confiance et contribue à donner de la considération au corps médical. C’est par ces motifs que la Prusse maintient sous le feu la moitié seulement des médecins de régiment, et nous croyons que cette proportion devrait être réduite à un tiers du personnel médical. Le second tiers serait plus utilement employé à surveiller, au point où l’on rencontre une route carrossable, le transbordement des blessés du brancard dans