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poursuivre le but indiqué par l’Association britannique. Il y a dans ce fait un exemple bien propre à fixer l’attention de ceux qui rêvent d’éclairer le peuple.


IV

C’est avec une entière certitude qu’on peut prévoir les avantages qui résulteraient à la fois pour le pays et pour les individus placés dans les différentes conditions sociales d’une éducation scientifique répandue d’une manière générale. Au souvenir d’heures charmantes passées à la poursuite d’une-recherche instructive ou dans les délices d’une observation curieuse, à la pensée toujours présente des services que rend l’habitude contractée de bonne heure de juger les questions avec maturité, beaucoup d’hommes devenus attentifs aux progrès des lumières voudraient prêter une assistance efficace pour la réalisation de grands projets. Le goût de l’étude, éteint d’ordinaire par le système d’éducation aujourd’hui en usage, ayant été vivement excité, persisterait chez un grand nombre de jeunes gens. Ceux que la fortune dispense de rechercher une carrière lucrative, au lieu de se jeter dans une vie de plaisir et de dissipation, aimeraient souvent à s’engager dans des études qui dévoilent à l’esprit des horizons. Fréquemment ceux que le sort a moins favorisés, ayant désormais la confiance que le vrai mérite ne tarde pas trop à être apprécié et encouragé, entreprendraient avec résolution de longs travaux, et brûleraient de l’envie de se distinguer. Alors de grandes choses s’accompliraient ; le pays en recevrait un vif éclat, la société un accroissement de richesse.

Dans la discussion des affaires publiques, l’influence heureuse d’une instruction solide tournerait au profit des intérêts généraux et de la morale. — Les hommes accoutumés à n’asseoir un jugement que sur des faits réels et bien constatés, se passionnant pour la vérité et pour la justice, craindront toujours le péril de raisonner sur des données vagues ou incertaines, et prendront en aversion l’esprit de parti. Vienne l’avenir rêvé, et le spectacle pénible dont nous sommes maintenant les témoins s’évanouira. Chaque jour, dans la presse et dans les assemblées, des opinions sont émises sur une infinité de sujets, des critiques sont dirigées contre des actes émanant soit dès administrations, soit de certains personnages, sans la moindre connaissance des questions. Une rumeur, une apparence de probabilité, une intention mauvaise a suffi pour inspirer la verve de l’écrivain ou de l’orateur. Devant un public que l’éducation ne rend pas difficile en matière d’examen, on peut s’abandonner à toutes les audaces sans danger d’être atteint dans sa considération,