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cassait les décrets des sanhédrins, et présidait un tribunal de recours contre les décisions des premiers juges. Ce haut personnage était abondamment rétribué par les cotisations de toutes les synagogues, car son gouvernement s’étendait sur l’ensemble des groupes soit occidentaux, soit orientaux. Les Juifs étaient tenus de le prendre, à ce qu’il paraît, dans la descendance de ce pharisien Gamaliel, célèbre dans les Actes des apôtres, et qui avait été le maître de saint Paul. Longtemps les patriarches résidèrent en Palestine, à Tibériade particulièrement ; ils se transportèrent ensuite à Constantinople, où ils occupèrent à la cour un rang distingué. Celui à qui appartenait alors cette sorte de royauté juive, et qui s’appelait Gamaliel comme son ancêtre, avait vécu dans la familiarité d’Arcadius, et ses honneurs ne lui avaient pas valu une réputation bien intacte. Les Juifs se plaignaient de sa partialité et de ses injustices, tandis que les chrétiens le soupçonnaient de prêter la main aux désordres et d’agiter lui-même sa nation. Il fut cassé à la suite du crime d’Inmestar. Le patriarcat même fut supprimé et remplacé par des primats provinciaux à la nomination des congrégations juives existant dans chaque province. Le droit de décider sur les suppressions ou créations de synagogues fut remis au gouvernement romain, qui fit main basse en même temps sur le produit des cotisations affecté aux patriarches. D’autres règlemens introduisirent la surveillance de l’état dans le mécanisme de l’administration israélite, et l’autonomie de ce peuple reçut par là de rudes atteintes. Il fut interdit aux individus d’acheter des esclaves chrétiens, et ceux qui se trouvaient en leur possession furent attribués aux églises : l’efficacité de ces prescriptions fut assurée par des pénalités énormes. Telle fut la dernière conséquence des événemens d’Alexandrie.


III

Cependant Théodose atteignait sa vingtième année, et Pulchérie songeait à le marier. Plusieurs fois on avait entendu le jeune césar dire à ses familiers qu’il ne chercherait dans une femme ni l’origine ni la richesse, qu’il voulait seulement qu’elle lui plût. Ce propos fit craindre à la prudente sœur quelque surprise d’eunuque pareille à celle qui avait conduit leur mère Eudoxie dans le lit d’Arcadius pour le malheur de tous deux, et avec autant de sollicitude que s’il se fût agi d’elle-même elle se mit en quête d’une épouse pour ce frère bien-aimé. Elle se fit faire des rapports sur toutes les filles à marier existant à Constantinople, soit romaines, soit barbares au service de l’empire, par ressouvenir sans doute du sang des Francs qui coulait dans ses veines. Elle était absorbée dans cette occupation lorsqu’une jeune Athénienne se présenta devant elle pour demander