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sol par un bord régulier, mince et plat ; c’est par un bord semblable qu’en restaurant en plâtre le pied gauche on a terminé sur ce pied le pli qui devait le couvrir. Aux deux endroits, on croit reconnaître l’ouvrage de la même main. Cette main se trahit encore dans la moitié inférieure de la jambe gauche, où il semble que des plis de draperie qui devaient de cette jambe aller au pied droit ont été en partie effacés, de manière à ménager en quelque sorte la transition de la largeur d’exécution du haut de la draperie à la maigreur de la terminaison qu’on lui donnait sur le pied gauche.

C’est dans cet état que la Vénus de Milo a été placée sur un piédestal et livrée aux regards, le corps trop long du côté gauche et par derrière, le torse, le col et la tête trop inclinés à droite et en avant, toute la figure déviée de son aplomb et modifiée dans son attitude. Maintenant qu’une circonstance fortuite a permis de constater que la statue est mal équilibrée et qu’elle a été changée dans ses proportions et son aspect, il y a lieu, ce semble, de faire en sorte qu’elle reprenne son assiette, ses proportions et son aspect d’autrefois. Or non-seulement c’est chose possible, mais c’est chose facile.

En premier lieu, pour rétablir les deux moitiés dans leurs justes relations, il suffit de bien remettre en place un seul fragment imparfaitement rajusté ; aussitôt les cales que la situation vicieuse de ce fragment avait conduit à employer deviennent inutiles ; le marbre vient reposer à plomb sur le marbre, la partie supérieure du corps se replace sur la partie inférieure dans son assiette primitive. Que si, en essayant de desceller le fragment rajusté à la hanche droite, on venait à rencontrer, contre toute attente, quelque difficulté qui fît craindre qu’on ne pût pas aller plus loin sans offenser le marbre, on renoncerait à ce descellement ; on se bornerait alors à remplacer les cales de bois qui ont été employées par une lame de plomb n’ayant que l’épaisseur strictement nécessaire, c’est-à-dire au maximum 2 millimètres, Réduite à de telles limites, l’altération des proportions, et de l’attitude serait très peu sensible.

En second lieu, pour rétablir l’ensemble de la figure dans ses conditions d’équilibre, il suffit de relever de droite à gauche et d’avant en arrière la plinthe antique et avec elle toute la statue, jusqu’à, ce que le plan de jonction des deux moitiés soit exactement horizontal, puis de modifier en conséquence la forme de la fausse plinthe dans laquelle la plinthe antique, est encastrée.


II

Après la question de l’assemblage des parties subsistantes de la Vénus de Milo, se présentait, lorsque autrefois elle arriva au Louvre,