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devant le conseil. Grâce à cette utile institution, les souffrances de la classe ouvrière à Nottingham ont beaucoup diminué. Les grèves des périodes précédentes imposaient de lourds sacrifices aux ouvriers durant la cessation du travail ; de plus, même en temps de paix, avant ou après la grève, les caisses de résistance exigeaient d’eux d’énormes contributions. Les trades-unions prenaient jusqu’à 1 shilling (1 fr. 25 cent) ou 1 shilling et 6 pence (un peu moins de 1 fr. 90 cent.) par semaine sur les salaires, et certaines familles, pour acquitter leur cotisation, devaient vendre leurs meubles ou leurs habits. Aujourd’hui la contribution payée aux trades-unions pendant plusieurs années dépasse à peine celle qu’on leur payait autrefois en quelques semaines.

Si les trades-unions n’épuisent plus les ressources des ouvriers, elles ont également cessé d’être redoutées par les manufacturiers. Les unions en effet, comme on l’a vu, ont été dès l’origine très favorables, très utiles à la formation des conseils d’arbitrage et de conciliation. M. Mundella déclare que sans elles il ne serait parvenu à aucun résultat. Par leur puissante influence, elles ont déterminé les ouvriers à écouter les premières propositions relatives à un essai de conciliation. Par leur administration toute formée, elles ont facilité le fonctionnement du système : leurs secrétaires ont recueilli les votes et organisé l’élection au suffrage universel. En même temps, leur concours est d’un très grand poids pour assurer l’exécution des sentences prononcées par le conseil.

De nombreuses tentatives ont été faites pour transporter dans d’autres industries le conseil de conciliation appliqué à la bonneterie, et qui, dans le district de Nottingham et les villages voisins, s’adresse à près de 60,000 ouvriers. En juin 1868, les ouvriers en dentelles de Nottingham ont demandé la fondation d’un semblable tribunal. Les propriétaires des mines du South-Lancashire et les unions de mineurs de ce district, grâce à l’intervention de lord Elcho, membre de la commission d’enquête, grâce encore aux conseils de M. Mundella, ont consenti à oublier leurs anciens et profonds dissentimens pour jeter les bases d’un conseil de conciliation. Les districts miniers du Staffordshire, de Middlesborough, les ouvriers en bâtiment de Bradford, enfin l’industrie elle-même des limes de Sheffield, où les unions ont si longtemps exercé leur pouvoir arbitraire et parfois criminel, ont demandé à M. Mundella de les aider à introduire dans leur sein le système qui lui doit son origine et son succès. Récemment encore, la grande corporation des ouvriers en fer du nord de l’Angleterre fondait un conseil de conciliation et d’arbitrage (1869), et M. Th. Hughes, membre du parlement, l’un des commissaires de l’enquête, était appelé comme arbitre à tran-