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tions n’allaient à rien moins qu’à une révolution complète ; le jeune régent de vingt ans n’en fut pas déconcerté. Il répondit sans s’émouvoir qu’il en aurait avis et délibération avec son conseil, mais qu’il voudrait bien savoir de la commission élue quelle était l’aide que les états étaient disposés à lui faire pour aviser aux nécessités urgentes de la situation, ce qui était l’objet principal de la convocation des états. La commission répliqua qu’on pourrait accorder une levée de 30,000 hommes, et un subside déterminé. Là-dessus, le prince les quitta en promettant de leur répondre le lendemain après dîner, « et pour ce assembla le dit Mgr  le duc au chastel du Louvre plusieurs de son lignage et autres chevaliers, et ot avis et delibéracion sur les choses dessus dites. »

Le résultat fut d’ouvrir des négociations avec la commission siégeant aux Cordeliers pour lui représenter l’énormité de ses exigences, et lui montrer que le dauphin régent ne saurait y satisfaire, attendu que leurs requêtes touchaient le roi de si près, qu’il ne les oserait accomplir sans le consentement exprès de son père. Ce n’était point le compte des élus, qui s’obstinèrent dans leurs demandes, tant que le conseil privé, craignant de plus grands malheurs pour la royauté bravée avec tant d’arrogance, penchait pour accorder les concessions réclamées. Le duc de Normandie ne s’y pouvant résoudre, les députés menacèrent de porter leurs demandes au grand jour de la publicité en la chambre du parlement et en séance générale des états. Alors le duc de Normandie délibéra derechef avec son conseil, renforcé de nouveaux opinons, et ramena les esprits à son avis, démontré qu’il fut d’ailleurs que l’aide proposée, soit en hommes, soit en argent, était insuffisante ; mais on se trouva sous la menace d’une émeute. Le moine de Saint-Denis, à qui nous devons sur ce point des détails particuliers, nous fournit la relation de la crise. « Moult grant peuple étoit assemblé en la dite chambre de parlement, en laquelle les dites requêtes dévoient tantôt estre faites au dit Mgr  le duc par la bouche de maistre Robert Le Coq, quant Mgr  le duc ot conseil coment il porroit faire départir le dit peuple. Par le conseil qu’il ot, il envoia quérir en la dite chambre du parlement pour venir par devers luy en la pointe du palais ou il estoit, aucuns de ceux des trois estas, et par especial de ceux qui principalement governoient les autres, et conseilloient a faire les dites requestes, et là leur dit Mgr  le duc aucunes nouvelles qu’il avoit oies, tant du roy son père, come de son oncle l’empereur, et leur demanda sé il leur sembloit que il fust bon que les dites requestes et response qui devoient estre faictes, et pour lesquelles faire et oïr le peuple estoit assemblé, fussent délayées jusqu’à une autre journée… Jasoit ce que on appercust que aucuns des dits envoyés eussent mieux voulu que la