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le syndicat d’une immense faillite, au lieu d’être l’expression sincère et définitive des intérêts et des convenances du pays. Je ne crains pas de le dire : ce serait la faute de ce parti, si la France, surmenée par ces expériences désastreuses, allait demander un abri à la monarchie constitutionnelle. Après tout, elle ne veut pas périr pour la gloire d’un principe contestable.


II.

Quand je parle ainsi du parti républicain, je désire qu’on m’entende bien. Je ne confonds pas les républicains de conviction avec les républicains de profession. Je range à part avec un grand soin et un respect sincère ceux qui ne placent pas la forme de leur prédilection au-dessus de la souveraineté du peuple, et n’ont jamais, dans le cours d’une longue vie dévouée à la même idée, prétendu faire violence à la nation. Ceux-là, s’ils étaient les plus nombreux et les plus forts, réussiraient, je n’en doute pas, à faire l’éducation politique et à former les mœurs viriles d’une France vraiment démocratique. Les républicains que je combats sont ceux pour qui la république est un idéal tellement tyrannique, qu’ils prétendent l’imposer de gré ou de force à la nation, et si intimement mêlé et confondu avec leur propre personnalité, qu’ils ne savent plus l’en distinguer, et se refusent à croire qu’il puisse être réalisé par d’autres que par eux-mêmes. À ce double signe, vous les reconnaissez, vous les avez déjà nommés.

À de rares exceptions près, c’est ce parti qui s’est emparé de la France le 4 septembre, et qui n’a rien négligé pendant six mois pour lui faire perdre le peu de goût qu’elle avait pour la république. Ce qui a toujours compromis cette noble forme de gouvernement auprès de beaucoup de bons esprits, c’est qu’on l’a toujours confondue, ou, pour parler plus exactement, qu’elle a paru se confondre elle-même avec la révolution, dont elle devrait être par essence la négation. Elle devrait fermer l’ère des grandes crises sociales, puisqu’elle est théoriquement le gouvernement du pays par lui-même ; il semble au contraire qu’elle soit destinée à rouvrir cette ère violente, qui ne se ferme plus pendant tout le temps qu’elle règne. Par une véritable fatalité, son origine et ses procédés de gouvernement ont toujours offert un mélange d’arbitraire et de force, une alternative de faiblesse et de violence, qui ont discrédité ses pratiques malgré l’excellence théorique de l’institution. Chaque fois qu’elle a essayé de revivre parmi nous, c’est par des coups de force ou de surprise qui ont enlevé au pays le mérite d’une adhésion spontanée et même le goût d’y adhérer. En même temps, issue de