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FRANCIA




DERNIÈRE PARTIE[1]




Au milieu de ces rêves affreux, Francia s’éveilla en criant. Il faisait grand jour. Mme Valentin l’entendit, entra chez elle, et voulut savoir la cause de son agitation. Francia fit un effort pour lui répondre ; mais elle ne voulait pas se confier à cette femme, et Mme Valentin fut réduite à parler toute seule. — Voyez-vous, ma chère enfant, lui disait-elle, si c’est parce que vous craignez la guerre, vous avez tort ; il n’y aura plus de guerre. Le tyran sera mis dans une tour où on prépare une cage de fer. Nos bons alliés sont en train de s’emparer de sa personne, et votre cher prince n’aura pas une égratignure : les cartes me l’ont dit hier soir. Ah ! vous l’aimez bien, ce beau prince ! Je comprends ça. Il vous aime aussi, à ce qu’il paraît. M. Valentin me disait hier : c’est singulier comme ces Russes se prennent d’amour pour nos petites Françaises ! Ça ne ressemble pas du tout aux fantaisies de notre ancien maître, qui avait fait arranger l’appartement où vous voilà pour mener sans bruit ses petites affaires de cœur. Eh bien ! il en changeait comme de cravate, et il y tenait si peu, si peu, qu’il oubliait quelquefois de renvoyer l’une pour faire entrer l’autre. Alors ça amenait des scènes, et même des batailles ; il y avait de quoi rire, allez ! Mais le prince n’est pas si avancé que ça ; c’est un homme simple, capable de vous épouser, si vous avez l’esprit de vous y prendre. Vous ne croyez pas ? ajouta-t-elle en voyant tressaillir Francia. Ah ! dame, ce n’est pas tout à fait, probable ; pourtant on a vu de ces choses-là. Tout dépend de l’esprit qu’on a, et je ne vous crois pas sotte, vous ! Vous avez l’air

  1. Voyez la Revue du 1er et 15 mai.