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Il est à ce propos une remarque qui doit se renouveler au sujet de toutes les catégories, et que je consigne ici une fois pour toutes. Du tableau des forces agissantes, on a toujours à rayer les hommes de dix-neuf à quarante ans, entre les mains desquels le chassepot a remplacé l’outil : il ne réussira jamais aussi bien que le travail à procurer aux familles ouvrières la poule au pot d’Henri IV. La tâche des hommes de dix-neuf à quarante ans dans les ateliers se trouve du reste rarement indépendante de celle des autres ouvriers, des plus jeunes par exemple. Le plus souvent les fabriques auraient dû se fermer et les métiers demeurer immobiles après le départ des premiers, alors même que les demandes n’auraient pas discontinué. Aujourd’hui donc plus rien, ou presque rien. À tout prendre, même en tenant compte çà et là de quelque besogne tout à fait courante, comme il s’en rencontre dans l’ameublement, et qui peut être faite par des femmes, on doit affirmer que la perte subie par le travail équivaut dans ce groupe au moins à 95 pour 100. Sur 110,000 ouvriers qu’on y occupait, il n’en reste actuellement pas 5,000, en comptant les hommes, les femmes et les enfans, qui soient en possession de leur labeur ordinaire.

Dans la seconde division, où apparaît encore, à un certain point de vue, le cachet parisien, se placent les industries relevant d’une manière plus ou moins directe du contrôle de la science, et celles qui sont au service immédiat de la pensée. Ce sont parmi les premières les fabrications des instrumens de précision et d’optique, des appareils d’horlogerie, des instrumens de musique, des phares, etc., et parmi les secondes l’imprimerie avec toutes ses subdivisions et toutes ses dépendances. Ce groupe employait environ 34,000 ouvriers pour un total de 176 millions d’affaires. Dira-t-on, en tenant compte de l’impression des journaux et des rares publications périodiques qui ont pu lutter contre l’orage, dira-t-on que le travail s’y trouve un peu moins généralement éprouvé que dans la précédente section ? C’est possible, pourvu qu’on ne s’arrête pas beaucoup dans cette supposition. Du moins, serait-il impossible de porter à moins de 85 ou 90 ouvriers sur 100 le nombre de ceux à qui la besogne a manqué ?

Au troisième groupe se rattachent la colossale spécialité du vêtement et l’industrie des fils et tissus. Le vêtement occupe à lui seul une armée entière. De toutes les industries de la capitale, pas une ne compte un aussi nombreux personnel, pas même celle du bâtiment ; quant au chiffre des affaires, il n’y a que l’alimentation qui s’élève plus haut. Portez à l’effectif du vêtement les tailleurs les cordonniers, les chapeliers, les individus qui travaillent dans la lingerie, dans les modes, dans la couture, dans les confections, dans le blanchissage, etc. — Pour les fils et les tissus, les