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comptes ont été dressés à diverses époques ; ceux que la chambre de commerce de Paris avait consignés dans une enquête spéciale faite avec beaucoup de soin sur l’année 1860 conservent une légitime autorité. Ils nécessitent évidemment de plus nouvelles investigations ; mais rien n’a été changé au cadre qu’ils embrassent depuis qu’ils ont été recueillis. Ils s’appliquaient déjà au nouveau Paris, tel que venait de le constituer l’annexion de la banlieue jusqu’aux fortifications.

La somme des transactions annuelles était alors évaluée à près de 3 milliards 1/2 de francs (3 milliards 369 millions). Et pourtant il ne s’agissait à ce moment-là, comme il ne s’agit pour nous à l’heure présente, que des professions industrielles, c’est-à-dire des exploitations qui réclament l’emploi d’ouvriers, en comportant une transformation de matières, une manipulation plus ou moins développée. La masse des affaires purement commerciales n’entrait point en ligne de compte, et nous la laisserons également en dehors de nos calculs. Les chiffres de 1860 se sont grossis par le cours naturel des choses durant un intervalle de dix années. C’est indubitable ; d’après l’avis d’hommes très compétens en de telles matières, l’accroissement ne saurait être estimé à moins de 10 pour 100, ce qui élève le montant total actuel à près de 4 milliards. La différence eût même été plus large sans les fautes commises dans la gestion des ressources de la cité parisienne, qui avaient ce fâcheux résultat, — et ce n’était pas le seul inconvénient, — de détourner les capitaux des voies normales de la production. Pour les loyers industriels, la marche ascendante a été plus marquée. On le croira sans peine, si l’on songe à l’entraînement général qui poussait tout le monde vers des augmentations exagérées devenues en quelque sorte contagieuses. Aussi est-il impossible, d’une époque à l’autre, de ne pas admettre une élévation de 25 pour 100. Comme on fixait le chiffre à 107 millions en 1860, on peut hardiment le porter à 133 millions pour 1870.

Sans doute ce sont là pour nous des témoignages d’une réelle valeur sur l’importance du mouvement industriel dans la grande cité. Au point de vue où nous nous sommes placés cependant, l’intérêt principal s’attache au troisième élément d’appréciation, je veux dire au nombre des ouvriers employés par l’industrie. Otez ce chiffre, et vous chercheriez en vain à déterminer les pertes essuyées dans les rangs du travail. Certes on ne doit pas prendre actuellement pour bases les données pures et simples applicables aux années qui viennent de s’écouler. Ce serait excessif ; on n’ignore point que, par suite des malheurs et des fautes qui nous ont conduits au bord de l’abîme, les nombres antérieurs s’étaient assez notablement réduits depuis neuf ou dix mois. Il faut placer dans