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servées. Il est impossible qu’il n’y ait pas des rapports fréquens et des obligations mutuelles entre les représentans du pouvoir central et les autorités locales ; mais cela peut se concilier avec l’indépendance des uns et des autres. Il n’est nullement indispensable que le pouvoir central soit armé contre les maires du droit de révocation pour leur laisser ces petites attributions. L’article 15 de la loi du 18 juillet 1837 donne au gouvernement les moyens de se prémunir efficacement contre les inexactitudes ou les infidélités des maires en pareille matière. « Dans le cas, dit cet article, où le maire refuserait ou négligerait de faire un des actes qui lui sont prescrits par la loi, le préfet, après l’en avoir requis, pourra y procéder d’office par lui-même, ou par un délégué spécial. » Cette mesure suffit et rend inutile le droit de révocation, qui est d’ailleurs illogique. Il est à peine besoin de dire que les frais nécessités par cette intervention supérieure seraient à la charge de la commune, qui pourrait, selon l’appréciation des tribunaux, les répéter contre le maire. Or, dans notre système, le maire n’étant élu que pour un an, comme en Angleterre, il est probable qu’en cas de faute pareille le conseil municipal ne le maintiendrait pas en fonctions. L’on voit avec quelle promptitude tombent les objections spécieuses que certains de nos juristes élèvent contre le self-government.

Toutes les villes doivent-elles avoir une organisation aussi simple que celle qu’on vient de décrire ? N’y a-t-il pas pour les immenses agglomérations qu’a créées notre civilisation moderne des conditions spéciales d’administration recommandées par l’expérience ? La constitution de l’an III, nous l’avons vu, avait donné un régime particulier aux cités de 100,000 habitans et au-dessus ; on divisait chacune d’elles en plusieurs municipalités distinctes, reliées par un bureau central à la nomination du gouvernement. Cette solution est trop artificielle, et n’offre aucune garantie de succès. Sauf les villes de Lyon et de Paris, l’opinion la plus générale est que toutes les agglomérations urbaines doivent avoir une organisation strictement uniforme, et qu’on ne saurait d’une grande ville faire une juxtaposition de tronçons isolés. Il est cependant une mesure qui nous semble complètement nécessaire, et qui, à vrai dire, n’est pas une dérogation au principe que nous venons de poser. Il serait à désirer que toute ville au-dessus de 50,000 habitans fût obligatoirement partagée en circonscriptions fixes, ayant pour bases la population sans doute, mais plus encore les origines, les traditions, les affinités d’esprit et d’habitudes ; chacune de ces circonscriptions nommerait, en raison du chiffre de ses habitans, un certain nombre de membres au conseil municipal. Il importerait d’éviter les remaniement fréquens et arbitraires de ces divisions, qui seraient moins des sections électorales que des quartiers ayant chacun un carac-