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gique des institutions. Même au point de vue doctrinal, il n’y a point d’hésitation possible. Si l’on persiste à revendiquer l’existence d’une force armée dont le commandement appartiendrait aux magistrats communaux, l’on renonce par cela même à revendiquer pour la municipalité le droit d’élire ces magistrats. De deux choses l’une : les maires et agens municipaux sortiront de l’élection dans toutes les villes, et la garde nationale sera supprimée ; ou bien la garde nationale sera maintenue, et le gouvernement nommera les maires, ainsi que tous les agens municipaux. C’est là une alternative rigoureuse : il est impossible de trouver un moyen terme. Pour nous, l’élection des maires emporte avec soi la suppression de la garde nationale. Dans aucun pays ayant de vigoureuses institutions locales, on ne rencontre de force analogue ; les milices anglaises ont une autre organisation et un autre caractère ; elles dépendent d’ailleurs de personnages nommés par la reine ou par ses représentans. Mais comment voulez-vous, reprend-on, que les maires soient élus par les conseils municipaux, puisqu’ils sont souvent les agens du pouvoir central ? Ne sont-ils pas en effet officiers de l’état civil et officiers de police judiciaire ? La réponse est facile. On peut sans inconvénient enlever aux maires leurs fonctions de police judiciaire. Avec l’organisation des circonscriptions cantonales, on aura les commissaires de police, les juges de paix, — dans les villes, les procureurs et substituts, à qui l’on pourra confier cette branche d’attributions, et sous l’autorité desquels l’on pourrait ramener les gardes champêtres. Le service y gagnera sans doute en régularité, quelquefois même en impartialité. Les maires seront ramenés à leur unique tâche, la gestion des intérêts économiques de la cité. On leur laisserait cependant les registres de l’état civil. Pour remplir cette tâche, peu importe leur origine et leurs opinions. Nous ne proposerons pas ici l’exemple de l’Angleterre, qui confie à des fonctionnaires spéciaux appelés registrars (enregistreurs) le soin de recevoir et de centraliser les actes de l’état civil. Ce système présente de sérieux avantages ; mais il déconcerterait nos habitudes, et conduirait à des frais inutiles. Il restera encore aux maires certaines menues attributions qui sembleraient devoir les placer sous la dépendance du pouvoir central. C’est ainsi que ces magistrats municipaux sont chargés de tout ce qui concerne la publication des lois et règlement ; ils doivent procéder à la révision des listes électorales, dresser le tableau de recensement pour la conscription, et en général accomplir toutes les obligations qui leur sont imposées par différentes dispositions éparses dans plusieurs lois. Y aurait-il nécessité et facilité à enlever aux maires élus ces attributions, qu’ils remplissent en tant que délégués du pouvoir central ? On ne voit pas pourquoi elles ne leur seraient pas con-