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l’exemption descend jusqu’à 100 livres sterling, ou 2,500 francs. En France, on pourrait l’abaisser beaucoup plus encore, jusqu’à 1,200 francs par exemple. Il n’y en aurait pas moins une partie notable de la richesse publique qui ne serait pas atteinte. Cette faveur se comprend, et nous ne voulons pas la combattre ; mais elle ôte tout de suite à l’impôt un avantage essentiel, celui d’être général, de frapper sur tout le monde, proportionnellement à la fortune. Ce n’est plus qu’une taxe d’exception plus ou moins bien établie, et qui a les défauts inhérens à ces sortes de taxes. Si l’on demande l’immunité pour les revenus au-dessous d’un certain chiffre, on la voudra aussi pour certaines catégories de revenu ; on la voudra pour les fermages de la terre, pour les profits de l’agriculture, pour ceux même de l’industrie, sous prétexte que celle-ci est déjà soumise à un droit de patente, et que ce serait la frapper deux fois pour la même chose.

En Angleterre, il n’y a d’exemption que pour les revenus au-dessous de 100 livres sterling. Au-dessus, tout le monde est atteint, suivant la nature de sa fortune, par une cédule spéciale désignée par une lettre de l’alphabet. La cédule a comprend les revenus de la terre ou attachés à la terre ; — la cédule b les profits des fermiers, évalués d’après le taux des fermages ; — la cédule c les rentes sur l’état, les dividendes des valeurs de bourse nationales et étrangères ; — la cédule d les profits industriels ; — enfin la cédule e tous les traitemens, pensions de retraite, etc. Voici quelle a été la somme pour laquelle chaque cédule a été portée au rôle en 1867, le taux de la taxe étant de 6 deniers ou pence par livre sterling, soit 2 1/2 pour 100. La cédule a comptait pour 69 millions de francs ou 36 pour 100 ; — la cédule b pour 9 millions ou 5 pour 100 ; — la cédule c pour 17 millions 1/2 ou 9 pour 100 ; — la cédule d pour 86 millions ou 44 pour 100 ; — la cédule e pour 4 millions 1/2 ou 2 d/2 pour 100. Le produit total était de 186 millions. Il résulte de ce tableau que la cédule d, qui comprend les profits industriels, est de beaucoup la plus productive, et que, si on l’écartait, ainsi que celle qui est afférente au revenu de la terre, l’income-tax, qui a une si grande importance dans le budget anglais, ne donnerait plus que des résultats insignifians. En Prusse, où la richesse est beaucoup moindre, et où la limite d’exemption s’élève plus haut, l’impôt du revenu sur le pied de 3 pour 100 ne rapporte que 20 millions de francs. Il est vrai qu’il est complété par une autre taxe, dite des classes, qui atteint tout le monde, tous ceux qui, à un titre quelconque, ont un revenu inférieur à 1,000 thalers. Cette taxe correspond à peu près à notre impôt personnel et mobilier, et le taux auquel elle est fixée varie entre un minimum de 1/2 thaler et un maximum de 24. Elle donne à elle seule le double de l’impôt du revenu, soit en-