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Mon élégance et mon esprit,
Péchés inconnus du Vandale !
L’empire et son affreux scandale,
Dont nul plus que moi ne souffrit,

M’ont valu cette honte énorme,
Après tant de maux endurés,
De voir, dans mes champs labourés,
Reparaître votre uniforme.

Déployez-les donc, vos drapeaux,
Que vos clairons sonnent leurs fêtes ;
Je suis la victime, et vous n’êtes,
Vous barbares, que les fléaux !

Penses-y bien, toi qui m’opprimes,
Prince arrogant et sans pitié,
Le ciel, quand il a châtié,
Relève parfois les victimes ;

Mais Dieu brise les instrumens
De sa souveraine vengeance ;
Malheur à toi, sinistre engeance,
Malheur à tous ces Allemands !


LE PRINCE

Sans trop me soucier, ma sœur, de la menace,
Je sais combien ta vie est profonde et tenace ;
Ni le fer ni le feu ne peuvent rien sur toi.

Plus bas et se parlant à lui-même.

Voilà ce que jamais ne comprendront le roi,
Ni Moltke, ni Bismarck, ni les autres… l’idée !
Oh, l’idée ! un éclair venu l’on ne sait d’où,
Une électricité qui rend le monde fou,
Une force en secret maintenue et gardée,
Qui va bravant la mort et son noir cavalier !
Tuez l’individu, vous ne tuerez point l’âme,
Elle s’échauffera — pour se multiplier —
Par la béante plaie, et vous serez infâme !
L’idée ! est-elle donc ce chardon du désert ?
Qui s’y frotte se blesse et se tue et se perd !


LA FRANCE

Songe au destin mélancolique
De l’empereur Othon second,
Ce fier Souabe jeune et blond
Resté sur le sol italique.