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département accorde une subvention de quelques centaines de francs Le député, les futurs candidats, diverses notabilités du pays, y ajoutent d’ordinaire quelques médailles d’argent ou de vermeil destinées à récompenser le plus beau lot de volailles, de légumes ou bien à primer la vertu des anciens serviteurs de ferme. Cette munificence peu coûteuse produit de médiocres résultats, et l’on ne peut guère prendre au sérieux de semblables solennités. C’est toujours en effet la même chose : pour les membres de l’association, tout se résume en rapports, discours, lectures de prose ou de vers sur l’estrade, rosettes à la boutonnière et toasts récités au banquet ; pour la foule, elle vient là comme à la foire ou à la fête, bâille aux discours, gouaille les lauréats, traite parfois quelques menues affaires, et ne perd pas l’occasion de boire. Si les sociétés de province voulaient renoncer à ces concours qui leur sont chers, ou plutôt les rendre plus sérieux et moins fréquens, si elles voulaient surtout descendre au terre-à-terre de la vraie pratique agricole, leurs services leur acquerraient vite l’autorité dont elles sont jalouses. À côté des chambres d’agriculture électives, dont la principale mission serait d’intervenir, lorsque les intérêts ruraux l’exigeraient, auprès du préfet, du ministre, de l’assemblée législative, les associations conserveraient le rôle très enviable de stimuler par tous les moyens possibles le progrès dans les cultures du pays, de venir en aide aux cultivateurs selon les circonstances et les besoins, de patronner les publications utiles, de propager les procédés recommandables, de se livrer elles-mêmes, ainsi que le font les Allemands dans leurs stations agronomiques, à des études et à des essais sur les engrais, les instrumens, les appareils, dont elles se proposeraient d’introduire l’usage dans les exploitations de la province. Elles, seraient ainsi à la fois des sociétés savantes et des sociétés d’encouragement et de secours. Elles régleraient l’emploi de leurs fonds sur les nécessités particulières de chaque année. Après la sécheresse du mois de juin 1870, le comité d’agriculture de la ville de Beaune employa l’argent dont il put disposer à l’acquisition de graines de fourrages tardifs qu’il distribua gratuitement, tandis qu’il était temps encore, aux cultivateurs de l’arrondissement de Beaune. Au mois d’août suivant, lorsque les mobiles et les soldats de la réserve furent appelés soudain sous les drapeaux, le comice de Tarare déclara qu’il se chargerait de faire labourer et ensemencer les champs des absens. Voilà des exemples de ce qu’on peut faire. Au-dessus des sociétés locales, quelques grandes associations qui embrassent toute une province, comme l’Association normande, ou même le pays entier, comme la société des agriculteurs de France, rendront des services d’autant plus précieux que leurs ressources sont plus importantes. La Société des agriculteurs de France notamment, fondée en 1868 par la