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existait au 1er juillet 1,007,555 fusils du modèle 1866, et les trois manufactures d’armes de Saint-Étienne, Châtellerault et Tulle étaient montées pour une production mensuelle de 30,000 armes au moins. Pour l’armement de quelques corps spéciaux et pour celui des gardes nationales mobile et sédentaire, on possédait 342,115 fusils ou carabines du modèle 1867, dit à tabatière, 1,673,734 armes à percussion rayées, et 315,667 armes à percussion lisses, au total 3,339,071 fusils, carabines et mousquetons, avec 287,215,135 cartouches et 251,749 pistolets. Il est vrai que deux cinquièmes seulement de ces armes étaient à chargement rapide, mais l’artillerie n’est pas un pouvoir dans l’état : elle ne peut fabriquer que ce qu’elle est en mesure de payer. Par elle-même, elle avait toute sorte de motifs de diminuer le nombre des armes démodées et de se soustraire aux difficultés compromettantes que présente la diversité des modèles et des calibres pour les approvisionnemens en pièces de rechange et en cartouches.

Bien qu’on ait fait évacuer à temps, dès la déclaration de guerre, les fusils Chassepot que possédaient les arsenaux de Strasbourg et de Metz au-delà des besoins des troupes d’opérations, fusils qui, dirigés d’abord sur Douai et Lafère, puis sur Paris, ont permis d’en fournir ici à près de 200,000 hommes, on ne peut pas évaluer à moins de 250,000 le nombre des fusils de cette espèce et à moins de 600,000 le nombre total des armes à feu tombées successivement aux mains des Prussiens depuis la frontière jusqu’à Paris. Il devait donc y avoir au 18 septembre environ 3 millions d’armes à feu disponibles pour la défense. En compensation des pertes, les manufactures d’armes ont dû produire depuis le 1er juillet 150,000 fusils Chassepot, et la majeure partie des 600,000 armes de fabrication étrangère pour lesquelles des marchés ont été passés à Paris depuis le 23 août jusqu’au 4 septembre doivent être maintenant dans les mains des troupes de province. Quelques milliers seulement de ces fusils ont pu arriver à Paris. Défalcation faite des 450,000 armes qui existent ici et des pertes qu’ont pu éprouver les provinces depuis que nous sommes séparés d’elles, j’estime que les départemens libres possèdent 3 millions de fusils, sans compter le résultat des mesures dont la délégation de Tours aura certainement pris l’initiative. Quoi qu’il en soit, il existait avant la guerre un million de fusils modèle 1866, nombre suffisant pour l’entretien d’une armée dont les divers corps de troupes à pied ne pouvaient pas encadrer au-delà de 500,000 hommes, plus de 2 millions d’armes à feu de différens types pour les gardes nationales et plus de 700,000 armes blanches.

Quant à ce fusil Chassepot, critiqué d’une manière si acerbe à