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REVUE DES DEUX MONDES.

En l’arrosant de votre sang, faites-la vôtre et prenez-la, cette république ; donnez-lui un baptême nouveau. Acceptez même qu’on vous commande d’une façon plus hasardeuse et moins modestement peut-être que vous ne l’auriez voulu : avant tout, la force par l’union ! S’il y a des choses à redresser, ce sera l’œuvre d’une puissance devant qui tout fléchira, l’œuvre de la nation ; mais pour qu’elle exerce à son heure sa souveraine autorité, il faut d’abord une patrie, c’est-à-dire un sol affranchi : que ce soit là votre unique pensée !

Nous, Parisiens, continuons notre tâche ; laissons à nos frères du dehors le temps de nous donner la main. Et d’abord, nous aussi, ne nous divisons pas, y a-t-il donc depuis quelques jours sous le plus vain prétexte, y a-t-il dans l’air, comme on veut le faire croire, je ne sais quel mauvais germe de 31 octobre, la plus honteuse maladie qui pût tomber en ce moment sur nous, le seul obus prussien dont les éclats nous pussent être mortels ? Vous laisser décimer, vous, dépositaires fortuits d’un pouvoir qu’à vous tous, en faisceau, vous pouvez à peine exercer, mais ce serait détruire en une heure nos cent huit jours de siège, ce serait ouvrir nos portes et abaisser nos ponts-levis. Non, j’en ai confiance, Paris restera lui-même : les intrigans, les stipendiés, les poltrons, se tiendront cois, et nous poursuivrons sans encombres, au bruit des bombes et du canon, mais avec calme, avec concorde, l’œuvre assurée, rien ne peut m’en ravir l’espoir, l’œuvre de notre libération.

L. Vitet.


ESSAIS ET NOTICES.

Lettres, instructions et mémoires de Colbert, publiés par M. Pierre Clément, de l’Institut, septième et dernier volume, imprimerie nationale 1870.


Nous avons sous les yeux les bonnes feuilles du volume qui doit compléter la collection des Lettres, instructions et mémoires de Colbert, confiée naguère par le ministère des finances à M. Pierre Clément. L’imprimerie nationale vient d’en terminer l’impression, et ce volume paraîtra dès que les circonstances le permettront. Un digne monument aura été de la sorte élevé à la mémoire d’un des plus grands administrateurs de l’ancienne France. Le premier volume de ce vaste recueil a paru il y a neuf ans. Les travaux concernant Colbert qui avaient précédé ne faisaient guère que montrer les difficultés d’une pareille entreprise, dont les élémens étaient singulièrement dispersés, soit dans les divers dépôts publics en France et quelquefois à l’étranger, soit dans les cabinets des érudits et les archives de familles.

C’était, bien entendu, notre bibliothèque nationale qu’il fallait com-