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disait-il, et le secret auquel nous devons ce succès est bien simple : c’est l’économie ; mais combien durera cette heureuse situation ? L’imprudence d’un officier subalterne, une demi-douzaine de verres de vin bus en trop par un agent placé dans une position responsable, enfin l’accident le plus insignifiant, the merest incident, peuvent nous engager dans des difficultés dont nous ne nous tirerons qu’au prix de dépenses énormes, et ces dépenses, ce sera encore l’économie qui seule nous procurera les moyens d’y subvenir. » Trois mois à peine s’étaient écoulés depuis que ces paroles avaient été prononcées quand est survenu l’accident pressenti par M. Lowe. La guerre, une guerre funeste, a éclaté sur le continent, et, bien que l’Angleterre n’eût pas à y prendre part, elle a dû néanmoins, pour parer à toutes les éventualités, augmenter dès le mois de juillet son effectif militaire, ajouter aux crédits du chapitre de l’armée, et peut-être ultérieurement de nouvelles mesures du même genre auront-elles encore été prises. De plus il est difficile que ses opérations commerciales et industrielles n’aient pas éprouvé soit un temps d’arrêt, soit tout au moins un ralentissement qui préjudiciera aux revenus de 1870, et probablement les résultats de cet exercice seront loin d’être ceux qu’il était permis d’espérer au moment où il a été ouvert. Isolés comme nous le sommes par le cercle de fer dans lequel Paris est enserré, on ne peut à cet égard, comme à l’égard de tant de choses qui nous touchent malheureusement de bien plus près, que se livrer à de vaines conjectures. Il ne nous reste donc pour terminer cette étude qu’à constater d’une façon succincte les conséquences qu’a eues pour les finances de l’Angleterre le régime économique et administratif invariablement pratiqué pendant la période qu’on vient de parcourir.

En quoi a consisté le régime économique ? A réduire et supprimer successivement toutes les taxes qui pouvaient être une entrave pour le commerce et l’industrie, ou qui pouvaient faire obstacle à la consommation des objets les plus nécessaires à la vie, — à aider ainsi au développement de la fortune publique, et à chercher la compensation du revenu sacrifié sur certains articles dans une augmentation de recettes provenant de l’usage plus abondant que l’accroissement de l’aisance parmi les masses leur permettrait de faire des articles non dégrevés. Le succès a été complet : déduction faite du produit de quelques droits nouvellement créés ou de quelques aggravations sur d’autres, l’excise, les douanes, le timbre, les taxes dites assessed, réduits depuis 1862 de 20 millions de liv. st., rapportent cependant 8 millions de liv. st. de plus qu’ils ne faisaient à cette époque. Sans doute, pour suppléer au déficit momentané qui devait résulter des abandons consentis, il a fallu recourir à l’income-tax ;