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de Philippe avait atteint au plus haut qu’il soit donné à la puissance de parvenir. On eût dit qu’il allait consommer l’unité des contrées helléniques sous son épée victorieuse jusque dans la Perse et dans l’Inde. A sa mort, ce gigantesque empire se partagea en états différens et ennemis, mais qui gardaient pourtant l’empreinte de la main qui les avait un moment soudés. L’esprit séparatiste se réveilla en Grèce ; l’agrégation se rompit. Un autre Philippe, après plus d’un siècle de luttes et de déchiremens, essaya de reconstituer la grande monarchie macédonienne et d’asseoir sa pleine autorité sur la Grèce entière, dont plusieurs peuples avaient fréquemment secoué le joug des héritiers d’Alexandre. Alors la Macédoine rencontra un maître qui la soumit par les mêmes moyens à l’aide desquels elle avait asservi les Hellènes. Rome, par une supériorité militaire dont elle avait puisé les élémens dans l’organisation de l’armée macédonienne, en usant de cette politique persévérante et artificieuse dans le réseau de laquelle Athènes s’était laissé prendre, prépara la ruine de Philippe et de son fils Persée. La victoire de Pydna non-seulement livra les états de ce prince au peuple-roi, elle abattit encore la nationalité macédonienne. La Macédoine fut partagée en quatre districts par le vainqueur, qui interdisait toute communication entre la population d’un district à l’autre, tant il redoutait les soulèvemens. Désormais le royaume de Philippe ne sera plus qu’un canton de la Grèce conquise. La Macédoine expiait ainsi son ambition et ses iniquités passées. Athènes donna les mains, avec Sparte, l’Étolie et d’autres contrées helléniques, à cette intrusion des Romains dans les affaires de la Grèce qui devait perdre la monarchie de Persée ; mais elle travailla pour de nouveaux dominateurs. Leurrée comme ses sœurs de la Hellade et du Péloponèse par les menteuses déclarations de Flamininus, elle n’obtint que cette sorte d’indépendance municipale que Rome concédait aisément, parce qu’il n’y avait rien à en redouter pour son autorité. Plus heureuse que Pella, que les villes de Macédoine, qui disparurent alors à peu près de l’histoire, Athènes poursuivit une existence pâle sans doute, mais belle encore par les souvenirs, et que le temps n’a pu effacer. L’éclat dont cette république avait rayonné illuminait quelque peu sa vieillesse. Elle était toujours la patrie des arts et des lettres ; elle continuait de vivre par ses monumens, ses écoles, ses pompes, ses fêtes religieuses. Quand Sylla vint l’attaquer pour l’enlever à la domination d’un nouveau maître, Mithridate, qui faisait luire aux yeux des Grecs un espoir de liberté, afin de s’en faire dis alliés contre Rome, elle était encore une des grandes cités helléniques. Elle se défendit vigoureusement et endura les horreurs du siège avec une fermeté digne de ses jours les plus