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mon cousin, et desdits princes, suivant vos promesses, sceaux, et les obligations authentiques que j’en ai par devers moi, dont toutefois je ne fais pas tant d’état que de la foi et parole que vous m’avez donnée. Le demeurant, vous l’entendrez de l’évêque de Bayonne, auquel je vous prie ajouter foi, et le croire, de tout ce qu’il vous dira sur ce de ma part, tout ainsi que vous feriez moi-même. »

Encouragé par ces paroles véritablement royales, qui n’excluent pas l’habileté dans leur droiture, Maurice continua la négociation pacifique qu’il poursuivait avec Ferdinand. Rien n’est plus digne de mémoire que le discours de Jean du Fresne, évêque de Bayonne, à l’assemblée de Passau, où Maurice l’avait amené pour que le roi eût une exacte connaissance de tout ce qui s’y passerait. Il leur parla d’abord, selon l’esprit du temps, de l’ancienne amitié qui avait existé entre les Germains et les Gaulois, et depuis entre les Allemands et les Français, de leur réunion sous les lois de Clovis et dans le grand empire de Charlemagne, dont le roi de France était un héritier ; il leur dit que l’empire d’Occident ayant été fondé dans cette famille royale, il avait été composé des deux nations, en sorte que l’empire appartenait à l’une et à l’autre, qu’il avait été depuis transféré aux empereurs saxons comme issus de nos rois, que Philippe-Auguste avait renouvelé cette ancienne alliance presque éteinte, qu’elle avait été depuis abolie par quelques princes étrangers parvenus à la couronne impériale sans être dignes de la porter, mais que l’empereur Albert, leur ayant succédé, avait signalé son amitié pour la France en résistant aux sollicitations de Boniface VIII, homme turbulent et superbe, et en refusant de prendre les armes contre Philippe le Bel et d’attaquer son royaume, que ce pape avait abandonné au premier occupant. Il ajouta que les princes de la maison de Luxembourg, de famille française, rendirent à l’Allemagne sa splendeur, et que l’un d’eux, Charles IV, avait donné à l’empire la bulle d’or, le palladium des libertés germaniques ; que ces beaux exemples auraient dû détourner l’empereur Charles-Quint de ses desseins contre la France et contre les princes allemands, qu’il avait rempli l’Allemagne de garnisons espagnoles, qu’il s’était rendu redoutable à tout l’empire par ses violences, ses exactions et la transgression des lois ; qu’il avait attenté à la liberté des diètes, dépouillé les Allemands de leurs biens, proscrit leurs princes comme des criminels, sapé l’autorité des électeurs et des états d’empire, violé le serment de ses capitulations ; que l’amour de la patrie avait armé le prince Maurice et ses confédérés, dont la voix avait été entendue par le roi de France, qui s’était porté sympathiquement à leur aide pour rétablir la Germanie en sa liberté ;, que, sacrifiant son repos à leur intérêt, le roi s’était lié avec eux par