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encouragemens. Le seul défaut que nous voudrions voir disparaître ou plus exactement le seul caractère que nous voudrions voir changer, c’est la couleur de la robe. Ce changement paraît sans importance ; il aurait cependant une influence heureuse sur les remontes. Les remontes évitent de choisir des chevaux à robe grise ou blanche, parce qu’ils sont dangereux, surtout pour les officiers, en servant de point de mire à l’ennemi. Un autre inconvénient moins grave, mais qui se fait sentir tous les jours, c’est la difficulté de les tenir dans un état de propreté convenable ; il ne suffit pas toujours de les étriller ni même de les laver pour faire disparaître les taches produites par le fumier sur lequel ils se sont reposés. Dans les régimens, la veille d’une revue, on les empêche de se coucher en les attachant au râtelier avec des longes assez courtes. Cette pratique est à la fois cruelle et nuisible à la santé des animaux. Une maladie, la mélanose, assez fréquente sur les vieux chevaux blancs, est très rare sur ceux à robe foncée. Les personnes qui débitent de la viande de cheval refusent, pour les abattre et les vendre, les chevaux qui ont à l’extérieur des traces de cette maladie : l’expérience leur a sans doute appris que, s’il y a des mélanoses à la peau, il y en a assez dans l’épaisseur des chairs pour rendre de grandes quantités de viande impropres à la consommation.

Le gris est la robe dominante chez les percherons, et, en employant pour les croisemens cette race, d’ailleurs excellente, on propage les chevaux à robe grise. De nos jours, les chevaux gris abondent dans des provinces où ils étaient rares autrefois ; c’est ce qu’il faut éviter en n’employant que des reproducteurs noirs ou bais. Il s’en trouve dans toutes les races, même dans la percheronne, dont le gris pommelé est considéré cependant comme un caractère typique. Si les chevaux gris étaient refusés ou payés moins cher que les chevaux à robe foncée, ils seraient bientôt aussi rares qu’ils sont communs aujourd’hui. La réaction que nous voudrions provoquer apparaît déjà : aux dernières foires de la Bresse, les poulains gris de quatre à cinq mois se vendaient 70 et 80 francs moins cher que les poulains à robe foncée. De plus des étrangers qui importaient dans leur pays des étalons percherons pour croiser leurs races de trait ont cessé l’importation à cause de la robe grise des métis. La dépréciation des chevaux gris, nulle pour les chevaux communs, les chevaux de trait, est de 150 à 200 francs pour ceux qui peuvent être attelés à des calèches ; elle est plus considérable encore pour ceux d’une grande valeur.

Ce qui contribue à la propagation des chevaux à robe grise en France, c’est qu’on croit qu’on ne peut pas changer la couleur des races de trait sans en changer les formes et les aptitudes. Les éleveurs n’ont vu dans une circulaire de l’administration des haras