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publics pour revoir et corriger les lois qui ont été promulguées ; mais ce qui manquera toujours à un semblable travail, c’est Une base vraie, c’est la coopération des gens du métier avec ceux qui ont médité sur la matière dans le silence du cabinet.

Pour élucider les mille complications d’une loi sur la pêche, — c’est-à-dire sur la moitié seulement des matières qui font partie de l’aquiculture en général, — on n’a rien trouvé de mieux que d’en soumettre les articles aux discussions des conseils-généraux. Ce qui est résulté d’une pareille méthode, on pouvait le prévoir : la loi qu’on a faite est hétérogène et par conséquent sans force, comme toute œuvre qui manque de cohésion. Nous reconnaîtrons cependant, pour être juste, que la dernière loi est sortie de l’ornière en essayant de devenir loi de production, tandis que tous les règlemens précédens n’avaient été que des lois de récolte. Malheureusement l’essor a manqué pour aller jusqu’au bout, pour remonter le courant des préjugés et de la routine ; l’on est demeuré à mi-chemin, dans les demi-mesures. C’est ainsi qu’on a pu introduire dans une loi spéciale des hérésies du genre de celle de l’article 1er : « la pêche, même à la ligne flottante, est interdite de telle date à telle date… « Que la loi interdise absolument la pêche pendant une certaine période, pour laisser aux poissons le temps de frayer, et parce que dans cette période ces animaux sont malades, — fort bien. Pour atteindre ce but, il suffit d’interdire alors la pêche aux filets seule, la pêche qui ne raisonne pas. À quoi bon interdire, et avec mention spéciale, la pêche à la ligne, puisque le poisson ne mord plus dès qu’il fraie ? Ce fait est connu de tous les pêcheurs.

Des critiques aussi fondées pourraient être dirigées contre la plupart des dispositions de ces lois singulières qui nous lient bras et jambes en nous disant d’agir. Celle que nous venons de critiquer mérite des reproches non moins justes au point de vue même de ce repeuplement qu’elle aspire à favoriser. En effet, il est impossible à quiconque étudie les mœurs des poissons dans nos pays de ne pas avoir remarqué que le moment du frai, — cet espoir de notre récolte, — varie considérablement d’une année à une autre, d’une zone de territoire à la zone voisine. Pourquoi donc ne pas établir, — comme on l’a fait, grossièrement il est vrai, pour la chasse, — une série de zones dans lesquelles varierait la fixation de la fermeture et de l’ouverture de la pêche de telle ou telle espèce ? Bien mieux encore, pourquoi né pas fixer dans chaque département, après une étude attentive et des observations répétées pendant dix, quinze, vingt ans, s’il le faut, les dates entre lesquelles pourra osciller la fermeture de la pêche ?

Si nous étions arrivés au point où en sont depuis des milliers