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à l’effectuer plus loin ou plus près. Si, dans le département de la Haute-Vienne, le montant des rachats en argent s’élève à 98 pour 100, ce n’est pas uniquement à cause des usages locaux que nous avons rappelés, c’est sans doute aussi parce que les deux tiers des journées sont prélevés pour la grande et la moyenne vicinalité. Si les rachats ne dépassent pas 16 pour 100 dans le département du Nord, c’est probablement parce qu’on y emploie 84 pour 100 des journées sur les chemins ordinaires, et 16 pour 100 seulement sur les autres réseaux ; La proportion des rachats est donc un thermo mètre très sensible, dont les oscillations Indiquent là un administrateur attentif quel parti il peut tirer de telle oui telle ressource, et quels ménagemens il doit avoir pour telle ou telle tendance, des populations. En outre la prestation a ce mérite, que celui qui la supporte se rend très bien compte de l’emploi qui en est fait. Quand le paysan est mis en demeure de payer ses contributions, on a beau lui expliquer que celles-ci ne sont pas toutes absorbées par l’état, qu’elles profitent en partie au département et même à la commune, il sent très vivement le sacrifice qu’on lui impose, il ne voit pas clairement le profit qu’il en retirera. Au contraire, lorsqu’il acquitte ses journées de prestations, il sait qu’il travaille au chemin dont il se servira pour se rendre à la mairie où à l’église, pour envoyer ses enfans au catéchisme ou à l’école, pour aller cultiver son champ ou conduire sa récolte au marché. Son intérêt est palpable, son avantage évident. Aussi peut-on dire que, de toutes les charges publiques, la prestation est peut-être la mieux comprise et la plus facilement acceptée.


II

Le système général de la loi de 1836 ainsi exposé, il convient d’examiner l’état actuel des chemins de grande communication et l’intérêt commun avant d’aborder la question des chemins vicinaux ordinaires. Le réseau de la grande communication présente ainsi qu’on l’a vu plus haut, une longueur de 85,000 kilomètres. Sur ce chiffre, 80,000 kilomètres sont en état de viabilité ; le surplus est en construction ou sera prochainement entrepris. Ce magnifique réseau peut donc être considéré comme terminé, et la loi de 1868 n’a pas eu à s’en préoccuper[1]. Il sillonné dès à présent toutes les contrées de la France, et il a développé les éléments de

  1. Excepté pour quelques départemens, dont la situation était, à cet égard, tout à fait exceptionnelle.