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première fois que, chez certaines plantes grasses, les grains de chlorophylle s’agglomèrent sur un point de la paroi des cellules lorsque la plante est exposée à l’action du soleil. Il observa que le phénomène n’a lieu ni dans l’obscurité ni dans les rayons rouges. — La lame plane, formée d’une seule couche de cellules, dépourvue d’épiderme, qui constitue les feuilles des mousses, parut à M. Famintzin plus commode pour ce genre d’observations délicates. C’est en étudiant ces lames au microscope qu’il a pu suivre les mouvemens qui s’y accomplissent. Pendant le jour, les grains de couleur verte sont disséminés à la partie supérieure et à la partie inférieure des cellules de la feuille. Pendant la nuit au contraire, ils se réunissent vers les parois latérales. Les rayons bleus agissent comme la lumière blanche. Les rayons jaunes, comme les rouges, maintiennent la chlorophylle dans sa position nocturne. L’ordre d’activité des rayons semble donc n’être plus le même ici que dans les phénomènes respiratoires. Les recherches,de M. Borodine et de M. Prillieux ont prouvé que ces migrations intra-cellulaires des corpuscules colorans existent chez presque toutes les plantes cryptogames et dans un certain nombre de phanérogames. Les observations de M. Roze publiées dernièrement montrent que, dans les mousses, les grains de chlorophylle sont unis entre eux par des filets très ténus de plasma, et peuvent faire supposer que ces filets sont la cause des changemens de position que nous venons de signaler. Peut-être y a-t-il là quelque relation véritable ; mais il ne faut pas oublier que les mouvemens intra-cellulaires de la matière plasmatique ont lieu jour et nuit, et que la lumière n’a pas d’action marquée sur eux. Les particules vertes au contraire rampent sur la paroi de la cellule, et se dirigent vers la portion la plus éclairée, comme font les zoospores et certains infusoires.

Biot raconte qu’en 1807, se trouvant à Fomentera, occupé aux travaux du prolongement de la méridienne, il employait ses heures de loisir à analyser les gaz contenus dans la vessie natatoire des poissons qui vivent dans la mer à diverses profondeurs. L’oxygène qui lui était nécessaire pour ces analyses lui était fourni par des feuilles de cactus opuntia qu’il exposait dans l’eau à la lumière solaire sous des cloches de verre, appliquant ingénieusement la découverte d’Ingenhousz et de Senebier. Il s’avisa un jour d’exposer ces feuilles dans un lieu obscur à l’éclairement opéré par des lampes placées au foyer de trois grands miroirs réflecteurs qui servaient pour les signaux de nuit de la grande triangulation. Il jeta la lumière de trois de ces réflecteurs sur les feuilles de cactus. On n’aurait pas pu placer l’œil dans cette masse de lumière sans être aveuglé, dit Biot. L’expérience, maintenue pendant une heure, ne fit