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de Lavoisier, il fit voir que l’air impur absorbé et décomposé le jour par les plantes n’est autre chose que l’acide carbonique produit par une bougie qui brûle ou par un animal qui respire, et que l’air pur résultant de cette décomposition est de l’oxygène. Il prouva de plus que le gaz dégagé par les végétaux pendant la nuit est également de l’acide carbonique, et par conséquent que la respiration diurne des plantes est l’inverse de leur respiration nocturne. Il démontra enfin que la chaleur ne peut remplacer la lumière dans ces opérations. La nature du phénomène était ainsi expliquée, mais il restait encore à savoir quel rapport existe entre le volume d’acide carbonique absorbé et le volume d’oxygène exhalé. Un autre Genevois, Théodore de Saussure, montra que le volume d’oxygène dégagé est inférieur à celui de l’acide carbonique absorbé, et qu’en même temps une portion de l’oxygène retenu par la plante est remplacée par de l’azote exhalé. Il admit que cet azote provenait de la substance même de la plante. — Cette fonction des parties vertes des végétaux s’accomplit d’ailleurs avec une grande vitesse et une grande énergie. M. Boussingault, qui a fait de remarquables travaux à ce sujet, remplit un vase de verre avec des feuilles de vigne, le plaça au soleil, et y fit passer un courant d’acide carbonique : il ne recueillit à la sortie que de l’oxygène pur. On a calculé qu’une feuille de nénufar abandonne ainsi pendant l’été environ 300 litres d’oxygène.

En 1848, MM. Cloëz et Gratiolet apportèrent de nouveaux faits. Ils établirent que les plantes aquatiques se comportent durant le jour comme les autres, mais que la nuit elles sont inactives et ne donnent lieu à aucun dégagement d’acide carbonique. Ils démontrèrent l’énergique instantanéité de l’action solaire sur la respiration végétale. En plaçant quelques feuilles de polamogeton ou de nayas dans une éprouvette remplie d’eau saturée de gaz carbonique, on voit, dès que l’appareil est exposé au soleil, se dégager de la surface des feuilles une infinité de petites bulles d’oxygène presque pur. L’ombre d’un léger nuage traversant l’atmosphère suffit pour ralentir aussitôt le dégagement, qui reprend une activité soudaine après son passage. En interceptant le faisceau solaire avec un écran, on observe très nettement les alternatives de rapidité et de lenteur dans la production des bulles gazeuses, selon que la plante reçoit ou ne reçoit point les rayons lumineux. Les plantes aquatiques présentent d’autres particularités intéressantes. La lumière diffuse est incapable d’y provoquer la décomposition de l’acide carbonique, à moins que le phénomène n’ait été préalablement excité par la lumière directe du soleil. Bien plus, l’influence solaire une fois produite, la réduction de l’acide carbonique se continue même dans l’obscurité. Le végétal persiste la nuit dans son