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LA CHINE
DEPUIS LE TRAITE DE 1860

Au mois de décembre de l’année 1857, une flotte combinée de bâtimens de guerre portant le pavillon tricolore de France et l’union Jack de la Grande-Bretagne remontait le cours du fleuve qui conduit à Canton. Les deux marines alliées étaient chargées d’obtenir satisfaction d’insultes et de violences faites à leurs nationaux par le vice-roi. Ce fonctionnaire avait saisi un navire placé sous la protection anglaise ; il avait en outre refusé d’exécuter certaines conditions des traités, et enfin il avait encouragé la population à l’attaque et à la destruction par le feu des factoreries européennes. Le meurtre juridique d’un missionnaire, M. Chapdelaine, exécuté pour crime d’apostolat malgré l’engagement pris par le gouvernement chinois de permettre la prédication et l’exercice de la religion chrétienne, ajoutait un grief de plus à ceux dont le redressement était confié aux canons de la flotte franco-anglaise.

Le 28 décembre, Canton est bombardé ; les soldats de débarquement escaladent les murailles, en chassent les Tartares, et se rendent maîtres en quelques heures de la ville, où le vice-roi prétendait nous empêcher de pénétrer même en visiteurs paisibles. Deux jours après, le vice-roi lui-même est pris, conduit à bord d’un navire anglais, puis à Calcutta, où il ne tarde pas à mourir, désavoué par son gouvernement, déchu de tous ses titres et dignités, pour avoir trop bien servi dans leurs haines impuissantes les mandarins de Pékin. C’était un personnage très inhumain, qui s’est vanté d’avoir fait tomber 70,000 têtes pendant la durée de son pouvoir.

Restait à tirer profit de la victoire. Le difficile n’était pas de prendre Canton, c’était de le garder. Cette capture ne pouvait être