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frais. Le comité de dames qui s’est constitué pour secourir les blessés nomme dans sa circulaire les machinés à glace parmi les objets qu’il se propose de se procurer ; c’est un exemple qu’il donne et qui mérite d’avoir des imitateurs.

L’art de la guerre étant déjà grandement redevable aux sciences d’application, et ayant lieu d’en attendre des acquisitions nouvelles, il s’ensuit qu’en se plaçant au point de vue exclusivement militaire tout gouvernement d’un grand état a intérêt à provoquer et à faciliter les travaux de laboratoire par lesquels des procédés nouveaux et des substances nouvelles se découvrent, se perfectionnent, et arrivent à une valeur pratique. La chose publique d’ailleurs en retire un profit direct de bien d’autres manières. Sous ce rapport, l’instruction publique a été mal servie depuis vingt ans.

Dans les débuts orageux de la première république, une excellente voie avait été ouverte à l’enseignement national. Les membres de la première classe de l’Institut (aujourd’hui l’Académie des Sciences) étaient dans les meilleurs termes avec le gouvernement ; ils avaient autorité sur lui, et l’enseignement s’en ressentit avantageusement. Napoléon Ier, membre lui-même de cette classe, continua ce système d’encouragement. Ce zèle bien inspiré s’amoindrit sous la restauration ; celle-ci frappa même avec rigueur plusieurs membres de cette académie, qu’elle considérait comme un corps ennemi. Sous la royauté de juillet, M. de Salvandy notamment favorisa le culte des sciences dans leurs applications. Le nouveau régime, institué en 1848 ou en 1852, trouve les choses en cet état. Tout faisait présager qu’à partir du jour où le pouvoir rentrait aux mains d’un Bonaparte, les sciences mathématiques, physiques et naturelles seraient de nouveau l’objet d’une sollicitude particulière. Comment en aurait-on douté ? L’empereur Napoléon III sait tout le bien qu’on peut tirer, pour la société, des applications diverses de la science ; il est lui-même un esprit chercheur, avide de cette sorte d’améliorations. Il a personnellement contribué, plus que qui que ce soit, à en faire arriver quelques-unes à maturité, car il est fondé à revendiquer l’honneur du canon rayé et du navire cuirassé ; il est de publique notoriété que c’est sous son impulsion que ces deux idées sont devenues des faits acquis. En outre l’empereur a fréquemment encouragé des fonds de sa liste civile bien des hommes qui s’adressaient à lui pour expérimenter des idées nouvelles empruntées à la science. Il semble que dans de telles circonstances le budget de l’instruction publique aurait dû immanquablement offrir à la science les moyens de se développer, et aux grands établissemens publics d’enseignement, sinon à tous, d’amples ressources pour façonner la jeunesse aux