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point trouvé pour cela, mais du moins on saura maintenant la direction qu’il convient de donner aux recherches et le vrai sens des investigations.

Il en est pour les humeurs morbides comme pour les tissus morbides. Elles dérivent des humeurs saines par des procédés analogues, et ne renferment point de principes étrangers à l’économie. Seulement elles se produisent là où elles ne devraient point se produire, et dans une proportion qui explique les désordres qu’elles amènent. Les liquides des diverses hydropisies par exemple proviennent de l’hypergenèse des sérosités normales, lesquelles sont extraites du sang par les membranes séreuses telles que la plèvre et le péritoine. Le pus est formé par un blastème émané du tissu cellulaire sous-cutané, et au sein duquel naissent les globules blancs[1]. Le contenu des différens kystes à liquide est produit semblablement aux dépens du plasma sanguin par une véritable hypersécrétion. Ces humeurs morbides ne débarrassent point l’économie de quelque subtil et dangereux principe, cause de tout le mal, comme on l’enseignait jadis, elles se forment sous l’influence d’une altération du sang, d’un trouble circulatoire ou d’un dérangement dans les actes soit de sécrétion, soit d’excrétion.

L’ancienne physiologie et l’ancienne médecine ont préconisé tour à tour le solidisme et l’humorisme, c’est-à-dire la prépondérance exclusive soit des solides, soit des liquides dans l’accomplissement des phénomènes vitaux. Ces systèmes ne sont confirmés ni l’un ni l’autre par les faits. Les tissus et les humeurs jouent des rôles également actifs et importans dans l’organisme, et la maladie a pour origine les altérations qui surviennent dans celles-ci aussi bien que les perturbations de ceux-là. En d’autres termes, il y a des maladies d’humeurs, des maladies de tissus et des maladies d’élémens anatomiques ; mais cette diversité s’évanouit quand on remonte à la cause commune de tous les phénomènes morbides, quand l’on découvre l’origine effective et intime des perturbations, c’est-à-dire la modification qualitative ou quantitative des principes immédiats. Nous revenons ainsi à notre point de départ, et nous trouvons à la fin de cette étude la preuve de l’intérêt qui s’attache à l’objet du commencement. La vraie médecine expérimentale et positive part en effet des principes immédiats normaux et s’élève par degrés

  1. Des auteurs qui avaient cru jusqu’ici que les globules de pus naissent par prolifération des élémens du tissu dit conjonctif se sont vus récemment contraints de renoncer à cette explication, conforme d’ailleurs à la théorie cellulaire, et ils en ont adopté une autre extrêmement ingénieuse, qui consiste à prétendre que ces globules viennent du sang sans jamais avoir constaté d’ailleurs comment ils se produisent dans le sang. Du reste, ils oublient aussi d’expliquer comment il se forme dans certains cas des collections purulentes où il y a cinq ou six fois plus de leucocytes que dans toute la masse sanguine qui a servi à les former.