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assis ; l’intérieur forme un sanctuaire où une vingtaine de personnes pourraient trouver place. D’Inosima, on peut retourner à Yokohama par le Tokaïdo, la grande chaussée impériale, en passant par les villages de Fouzi-zama et de Hodongaïa. Sur tout ce parcours, les Japonais se sont familiarisés avec les étrangers, et dans les maisons de thé où ceux-ci ont l’habitude de s’arrêter, on en connaît un grand nombre par leur nom.

Ivanasawa n’est qu’un joli petit village admirablement situé au bord de la mer ; mais les anciens et beaux temples de Kamakoura sont curieux à visiter, ils se trouvent réunis dans un parc soigneusement entretenu. La grande route, qui débouche en face de l’entrée principale, a reçu des soins tout particuliers : elle est tirée au cordeau, d’une largeur inusitée, bordée d’arbres superbes et divisée en trois allées parallèles ; celle du milieu forme en quelque sorte une voie sacrée sur laquelle on ne passe pas d’ordinaire : elle est destinée aux processions religieuses qui se rendent en cérémonie au grand temple du dieu de la guerre de Kamakoura. Cette belle allée a une longueur d’environ un kilomètre. À l’extrémité opposée au parc, elle se divise en trois chemins différens : un petit sentier, encaissé au début entre deux remparts d’une hauteur d’environ 4 pieds, continuant en ligne droite la grande allée, conduit à travers un petit bois au bord de la mer. Ce bois est fourré, et on peut s’y dérober facilement aux yeux des passans. Deux autres sentiers se bifurquent à gauche et à droite de la grande allée et se dirigent, le premier vers quelques habitations de paysans cachées derrière un rideau d’arbres, le second vers le colosse de Daïbouts dont il a été parlé plus haut. Cette dernière route est celle que prennent les voyageurs qui vont à cheval de Kamakoura à Daïbouts. En quittant l’allée, elle parcourt une plaine cultivée, habitée par quelques fermiers, dont les petites maisons s’élèvent irrégulièrement çà et là au milieu des champs et le long de la route. Dans cette plaine, il n’y a pas d’arbres, et de loin on peut apercevoir les gens qui la traversent.

Au sommet de l’angle formé par la grande allée de Kamakoura et le sentier de Daïbouts se trouve un vieil arbre dont les branches forment un berceau de verdure. Ce tronc est entouré d’un banc de bois. Une personne assise sur ce banc peut aisément surveiller l’allée qui mène au temple de Kamakoura, les sentiers conduisant à la mer et aux maisons de paysans, et enfin la plaine de Daïbouts ; il lui est facile aussi d’éviter les regards d’un arrivant en se cachant derrière l’arbre. Celui qui va de Kamakoura à Daïbouts laisse ce banc à deux pas à sa droite ; à la gauche de la route, en face de l’arbre, se trouve une misérable petite hutte où quelques passans