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fique. Au dessert, le roi but à l’anglaise avec plusieurs d’entre nous, puis, en quelques paroles simples et graves, il porta un toast au congrès et remercia les hommes d’étude qui étaient venus rendre hommage au savoir danois. L’illustre et vénérable archéologue suédois Sven Nilsson répondit au nom de tous. Ensuite vinrent les causeries, et là encore le roi, la reine, les princes, réservèrent à peu près tout leur temps pour ceux que recommandait seulement leur qualité d’hommes de science. Certes ils n’eussent pu recevoir avec plus d’éclat, avec plus de grâce et de bienveillance, les envoyés des plus puissans états ou des majestés en voyage.

L’antique hospitalité semble exister encore en Danemark. — La science fut toujours en honneur dans l’Athènes du nord. Les études antéhistoriques, considérées à juste titre comme essentiellement nationales, y sont en grande faveur. Les journaux de Copenhague entretiennent et vulgarisent ces sentimens. Tous, ils se sont fait les interprètes quotidiens de nos travaux et ont consacré de longues colonnes à nos séances, si bien qu’en cas de perte de nos archives la collection du Dagbladet pourrait servir à retrouver les actes du congrès. Le prédécesseur du roi actuel, Frédéric VII, fut un archéologue distingué. Christian IX lui-même est président de la Société des antiquaires; seul, ou accompagné du prince royal, il assiste souvent aux séances comme un simple membre. Toutes ces circonstances rendent compte en partie de l’accueil exceptionnel fait par la haute société, par les classes éclairées de Copenhague, aux plus modestes représentans d’un ordre d’idées exclusivement scientifiques. Pourtant ni les mœurs, ni les traditions, ni l’influence de la presse, ne sauraient expliquer pourquoi le même empressement nous attendait partout, pourquoi la foule nous entourait avec la plus affectueuse curiosité dans les allées de Tivoli, pourquoi notre apparition dans une petite ville, dans les campagnes, faisait éclater une véritable allégresse. En m’exprimant ainsi, je n’exagère pas. Pour convaincre le lecteur, il suffira de raconter brièvement une de ces excursions dont la science était le but, et que nos hôtes, aidés par la population entière, savaient transformer en fêtes splendides pour le cœur autant que pour l’intelligence.

Au nombre des objets les plus curieux que nous venions étudier en Danemark, il faut placer les kjœkkenmœddings, littéralement les débris de cuisine. Ce sont des amas de coquilles d’huîtres, de bucardes, etc., au milieu desquelles sont disséminés des ossemens beaucoup plus rares de poissons, de mammifères, d’oiseaux. Ces restes des repas des antiques peuplades du littoral forment des accumulations souvent considérables, parfois de véritables collines. Bien des objets travaillés de main d’homme, et surtout des outils