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néral Valée, avec les troupes les plus valides, ne quitta Constantine qu’après avoir organisé le pays sous l’autorité française, mis la place en état et laissé sous les ordres du ferme et intelligent colonel Bernelle une garnison de 2,500 hommes approvisionnés pour cinq mois.

Le retour jusqu’à Bône, où tout était rentré le 4 novembre, fut triste et pluvieux. La brigade du duc de Nemours faisait l’arrière-garde, et poussait devant elle la cavalerie à pied et les chariots pliant sous le poids des blessés et des malades. Des lions et des milliers de vautours accompagnaient cette armée, sur laquelle le choléra levait journellement sa dîme, et dont chaque bivac était marqué par de vastes fosses remplies de cadavres.

Mais les manifestations de la reconnaissance nationale firent bientôt oublier leurs souffrances à ces braves, qui trouvèrent leur plus douce récompense dans la joie de la France, si justement fière de ses soldats. Depuis les victoires de l’empire, aucun événement militaire n’avait aussi profondément remué la fibre nationale que cette campagne de Constantine, qui prouvait à l’Europe que notre race n’était point dégénérée, et que les occasions seules lui avaient manqué. Le roi honora par un acte de justice ce succès vraiment populaire : le bâton de maréchal de France, accordé au général Valée, fut une noble confirmation d’une nomination préparée par le dévoûment, faite par le canon et sanctionnée par la victoire. Le maréchal comte Valée, nommé général en chef de l’armée d’Afrique, demeura à la tête de ces troupes qui, suivant son expression, « venaient d’égaler ce qu’il avait vu de plus beau dans sa longue carrière. »

La fin de la guerre, que semblaient promettre le traité conclu avec l’émir Abd-el-Kader et la chute d’Achmed-Bey, ne donna ni la paix à l’Algérie, ni le repos au soldat français. L’absence de la gloire rendit même plus pénibles des devoirs qui, pour être différens de ceux qu’on venait d’accomplir, ne furent ni moins nombreux ni moins importans.


Ce curieux et simple récit est tiré d’un ouvrage de M. le duc d’Orléans, qui paraîtra prochainement à la librairie Michel Lévy, sous le titre de Campagnes de l’armée d’Afrique de 1835 à 1839. Ce livre de M. le duc d’Orléans, publié par ses fils, sera certainement lu et recherché en France.