Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 86.djvu/745

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui remonte coupe l’air par sa tranche, et peut même en glissant sur l’air transformer en force ascensionnelle une fraction de la vitesse horizontale acquise par le battement descendant. Lorsqu’elle s’abaisse, l’aile est d’abord inclinée d’avant en arrière, mais l’humérus tourne ensuite de manière que le bord antérieur descend plus vite que le bord postérieur; à ce moment, la pression de l’air soulève l’oiseau en même temps qu’elle le porte en avant. Vers la fin du battement, l’aile, qui a été fléchie, se détend comme un ressort et reprend sa position primitive, ce qui prolonge l’effet du coup ; elle remonte enfin en restant parallèle à elle-même, et il est facile de s’assurer que la résistance qu’elle rencontre pendant cette phase est très faible, ou même dirigée de bas en haut.

La méthode graphique, dont l’emploi était facile avec les insectes, ne peut plus s’appliquer dans les mêmes conditions lorsqu’il s’agit d’un canard ou d’un pigeon, parce que l’oiseau ne vole que si on le laisse libre. Il fallait donc établir entre l’oiseau et l’appareil enregistreur une transmission de signaux. Cette transmission, M. Marey l’a obtenue de plusieurs manières, et d’abord par l’électricité. L’appareil fixe représentait un poste central de télégraphie de campagne, l’oiseau était le poste volant. La grande salle de l’ancienne Comédie-Française, que M. Marey a convertie en laboratoire de physiologie, offrait pour ces expériences tout l’espace nécessaire. L’oiseau emportait un câble fin et souple qui contenait deux fils conducteurs; les deux bouts des fils communiquaient avec un jeu de soupape attaché à l’une des ailes, qui ouvrait le circuit électrique quand l’aile s’élevait, et le fermait lorsqu’elle s’abaissait. En même temps le télégraphe traçait sur le cylindre tournant une ligne crénelée qui reproduisait les alternatives rapides des mouvemens alaires. C’est ainsi que M. Marey a pu compter avec précision le nombre des battemens que divers oiseaux exécutent dans l’espace d’une seconde : il a trouvé en moyenne 13 battemens par seconde pour le moineau, 9 pour le canard sauvage, 8 pour le pigeon, 5 pour la chouette effraie, 3 pour la buse, et ainsi de suite. La fréquence des battemens varie du reste suivant que l’oiseau est au départ, en plein vol ou prêt à se poser. Quelques oiseaux offrent des temps d’arrêt où ils ne font que planer. Ces expériences ont encore montré que la durée de l’abaissement de l’aile est en général plus longue que celle de l’élévation. M. Liais croyait au contraire avoir constaté que l’aile descendait plus vite qu’elle ne s’élevait; pour les frégates, il avait trouvé la durée de l’ascension cinq fois plus longue que celle de la descente. Il est possible que le rapport des deux temps varie avec les circonstances, et d’une espèce à l’autre.

Un autre procédé employé par M. Marey repose sur l’observation du gonflement et du relâchement successifs des muscles du thorax