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voir que la défiance était fondée. Il n’a pas fallu moins de deux mois au nouveau préfet de la Seine pour revoir tous les chiffres, apurer les comptes, avant de transmettre un travail définitif au conseil d’état, et les résultats diffèrent notabIement de ceux qui avaient été produits par son prédécesseur avec l’approbation accoutumée du conseil municipal. C’est ainsi que les avances de la caisse des travaux s’élèvent, non plus à 27 millions, mais à 49. Dans le mémoire présenté au conseil au commencement de mars, M. Chevreau déclare qu’il faut verser à la caisse des travaux immédiatement, sous peine de voir protester la signature de la ville, 19 millions pour la mettre à même de liquider ses comptes, plus 30 millions que le caissier municipal a prélevés, pour les lui prêter, sur les fonds hors budget. En outre la ville a contracté une série d’engagemens qu’il faut récapituler, si l’on veut connaître à fond sa position. Ce sont toutes les sommes à rembourser, en même temps que les annuités de la dette, pour le rachat des ponts, du canal Saint-Martin, du privilège des voitures, des abattoirs, etc., — pour les acquisitions des immeubles à long terme, les constructions des écoles, les subventions applicables aux travaux de voirie ; il y a aussi le remboursement des bons de la caisse des travaux échelonnés jusqu’en 1876. À ces obligations formelles, on doit enfin ajouter les dépenses des entreprises commencées, qui constituent une véritable dette morale. Au 31 décembre 1869, on devait en solder pour 30 millions environ. L’ensemble de tous ces travaux, parmi lesquels on doit citer au premier rang la dérivation fort avancée des eaux de la Vanne, est évalué par M. Chevreau à 128 millions. En laissant de côté Bercy pour lequel la ville a dépensé 24 millions, y compris les sommes employées en achats de terrains, c’est donc, avec le déficit de 50 millions relevé plus haut, 178 millions à répartir sur les budgets futurs. Comment fera-t-on face à toutes ces dépenses ? Comment réglera-t-on enfin le budget extraordinaire de 1870, que le corps législatif n’a pas encore été mis à même de voter ?

Tel que l’avait présenté M. Haussmann, ce budget se soldait en recettes et en dépenses par 210 millions ; mais ces chiffres n’étaient qu’apparens, il y avait à en retrancher avant tout 142 millions de l’emprunt de 1869, destinés à rembourser pour pareille somme les bons de délégation remis au Crédit foncier, ce qui constitue une simple conversion de dettes. Il fallait aussi déduire des recettes l’excédant du budget ordinaire, soit 37 millions 1/2 ; les recettes extraordinaires de 1870 se bornaient à 30 millions environ, dont 25 devraient être fournis par la vente des terrains appartenant à la ville. Quant aux dépenses, si l’on en retranchait 20 millions pour le remboursement forcé du capital de la dette de la ville, et 7 millions des subventions dues à l’assistance publique, il ne restait plus que