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Telles étaient les bases posées par le programme. Quoique l’histoire n’en dise rien, il devait reproduire aussi l’avis déjà exprimé par le pape Innocent, à savoir que les évêques des deux synodes précédens qui se seraient trop compromis pour ou contre l’archevêque par leurs discours et leurs actes ne seraient point admis à siéger au futur concile, afin que la nouvelle assemblée restât exempte, autant que possible, des anciennes passions et des partis arrêtés à l’avance.

Le programme ainsi rédigé de concert entre l’église d’Italie et l’empereur d’Occident, on procéda ensuite à la composition d’une ambassade qui le porterait à l’empereur d’Orient ; on désigna pour en faire partie cinq évêques distingués par leur mérite personnel : Émilius de Bénévent, Cythégius, dont le siége n’est point marqué, Gaudentius de Brixia, Marianus, évêque d’une des provinces d’Apulie, et un cinquième que l’histoire ne nomme pas. Le pape Innocent voulut y adjoindre deux prêtres de l’église romaine, Valentinien et Boniface, le même probablement qui succéda plus tard au pape Zosime, et il les fit accompagner par un diacre. On jugea convenable en outre de laisser partir avec l’ambassade quelques-uns des évêques orientaux réfugiés à Rome, afin d’éclairer les députés occidentaux sur les hommes et sur les choses de l’Orient, et de faciliter à ces malheureux le retour dans leur patrie. Les lettres officielles dont l’ambassade fut chargée étaient au nombre de trois, savoir : une de l’empereur Honorius à son frère, une d’Innocent adressée également au prince du domaine oriental, et une autre encore écrite à la requête d’Honorius par Cromatius d’Aquilée, dont l’autorité était considérable de l’autre côté de la mer. La lettre du prince contenait ces mots :

« J’avais déjà écrit deux fois à ta mansuétude, pour qu’elle voulût bien corriger et amender les choses qui ont été faites par complot contre Jean de Constantinople, choses dont le redressement n’a point été opéré. Plein de sollicitude pour la paix ecclésiastique qui concourt si merveilleusement à la tranquillité de notre empire, je t’écris pour la troisième fois, par l’intermédiaire de ces évêques et de ces prêtres, afin que tu daignes ordonner la réunion des évêques d’Orient en une assemblée générale à Thessalonique. Nos évêques d’Occident en effet, élisant parmi eux des hommes très fermes contre le mal et le mensonge, envoient vers toi, pour obtenir de ta mansuétude l’octroi de cette réunion, cinq évêques, deux prêtres et un diacre de la grande église romaine.

Daigne, je t’en prie, les recevoir avec tous les honneurs dus à leur caractère, afin que, s’ils reviennent persuadés que l’expulsion de Jean a été légitime, ils m’enseignent à me retirer de sa commu-