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de ce type, à des caractères psychologiques réels, mais superficiels, et réductibles à des facultés plus élémentaires.

Les historiens, les ethnographes, les moralistes qui invoquent la statistique, les savans qui voyagent pour explorer les contrées et les peuplades sauvages, usent d’une méthode analogue, seulement avec moins de vigueur et d’étendue, parce qu’ils n’opèrent pas sur des données aussi nombreuses et aussi complètes. De tous ces observateurs de la nature humaine, les historiens sont ceux qui disposent de la plus large expérience. Comme ils ont affaire à des peuples dont le génie s’est manifesté sur un théâtre plus ou moins vaste et à travers une durée plus ou moins longue, ils sont moins exposés à se tromper sur l’existence et la nature de caractères psychologiques qui se sont produits au grand jour de l’histoire ; mais là encore il n’y a que des œuvres supposant des facultés, des effets supposant des causes, que l’historien peut tout au plus deviner à travers leurs manifestations, mais qu’il ne peut ni décrire, ni analyser, ni définir, parce qu’il ne les atteint pas directement. Et alors qu’y a-t-il d’étonnant à ce qu’il se trompe dans ses inductions, à ce qu’il confonde une institution transitoire avec une loi de notre nature, à ce qu’il prenne pour une faculté primordiale, pour un principe constitutif de l’humanité, ce qui n’est que le résultat d’un concours de facultés primitives ? Comment se reconnaître dans cette psychologie si concrète qu’on appelle l’histoire, si l’on n’a pas d’autre flambeau que l’expérience historique elle-même ? C’est ainsi que l’historien qui n’éclaire pas son sujet des lumières de la conscience arrive inévitablement à faire de toutes les institutions politiques, sociales, religieuses, qui ont duré et dominé, autant de principes éternels de la nature humaine.

L’ethnographie de notre siècle est parvenue, soit par l’observation directe, soit par la science des langues et des idiomes, à des vues ingénieuses, instructives, souvent solides, sur les caractères essentiels du génie des races diverses qui peuplent le globe. En recueillant les particularités de mœurs qui se retrouvent chez les différentes peuplades nègres à l’état naturel et primitif, on a pu dégager ce qui fait la nature propre de cette race, à savoir la prédominance marquée de la sensibilité sur la volonté et l’intelligence : d’où le défaut d’initiative et d’originalité, l’incapacité radicale pour les idées et les spéculations abstraites, pour les arts et les œuvres de grande création qui réclament une puissante volonté, pour les institutions de self-government qui demandent une forte personnalité ; d’où au contraire une aptitude marquée pour toute œuvre de passion violente, de sentiment tendre, d’imagination grossière. On commence à connaître assez les peuples de race jaune, Chinois, Japonais,