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différence ; il se rappellera que vous avez diminué le poids de la livre sterling de 2 pence, il vous accusera de l’avoir trompé et d’avoir falsifié les monnaies. C’est toujours une chose grave que de froisser en pareille matière les instincts populaires et de faire au public des théories qu’il n’apprécie pas. On est, d’un autre côté, beaucoup plus sévère encore ; on nie absolument que la plus-value puisse jamais compenser la diminution en poids de 2 pence dans la livre sterling, et voici comment on raisonne. — La livre actuelle pèse 123 grains, correspondant à une valeur intrinsèque de 25 francs 20 ou 22 cent. Son prix courant ou commercial oscille entre 25 francs 22 cent, et ce prix augmenté de ce qu’on a dû payer pour le délai de fabrication, soit 1 penny 1/2 : elle ne peut pas valoir moins que la valeur intrinsèque ; autrement on la fondrait pour la vendre en lingot, et elle ne peut valoir plus que cette valeur augmentée du penny 1/2 ; autrement encore on la ferait fabriquer directement, et on profiterait soi-même de là différence. Par conséquent sa valeur réelle est entre un maximum de 25 fr. 26 cent, et un minimum de 25 fr. 20 ou 22 cent. Si vous en retranchez un grain, qui représente 22 cent., pour le remplacer par un droit équivalent, elle ne vaudra jamais, en supposant que la plus-value égale quelquefois le montant du droit, qu’un maximum de 25 francs 22 cent., et elle pourra descendre à un minimum de 25 fr., qui sera la valeur intrinsèque. Son prix courant sera entre les deux, il ne compensera donc pas d’une façon normale et permanente le prix actuel de la livre sterling. Ce raisonnement est rigoureux, et on ne voit pas ce qu’on y pourrait répondre, la question étant ainsi posée.

On établit encore un autre dilemme. On dit au chancelier de l’échiquier, qui veut réduire la livre sterling de 2 pence pour l’assimiler à la pièce française de 25 francs : De deux choses l’une, ou le nouveau souverain réduit en poids vaudra l’ancien par l’effet de la plus-value, c’est-à-dire 25 francs 22 cent., et alors il n’est pas assimilé à la pièce de 25 francs du gouvernement français ; ou, s’il lui est assimilé, il n’est pas l’équivalent de la livre sterling, il ne peut pas valoir à la fois 25 francs 22 cent, en Angleterre, et 25 francs juste pour les rapports avec la France. Cet argument n’est point sans réplique, il y a un point de vue auquel on ne fait pas attention : il s’agit, remarquons-le, de faire de la pièce de 25 francs une monnaie internationale ; on la frapperait en France également d’un droit de 1 pour 100, car on suppose qu’on se mettrait sur ce point d’accord avec notre pays. Alors elle ne vaudrait pas seulement 25 fr. comme aujourd’hui, elle vaudrait cette somme plus le montant du droit nouveau ; elle les vaudrait d’autant plus qu’elle aurait une utilité particulière en traversant la frontière ; on ne serait plus obligé de la