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et habile. Que le plus pauvre paysan, « le paysan est l’homme du pays, » dessine ses instrumens de travail, les roues et le soc de sa charrue. Après l’orateur, un frère de la doctrine chrétienne prend la parole. C’est le frère Victoris, dont le nom, attaché à une méthode particulière, est bien connu dans la plupart des écoles religieuses. L’institut auquel il appartient procure des notions primaires d’art à 400,000 enfans en France (c’est le chiffre qu’il a donné) ; il regarde cet enseignement comme un de ceux qu’il est dangereux de négliger. Les idées qu’émit le frère Victoris sur le choix peu scrupuleux des sujets représentés dans les publications destinées à l’enfance soulevèrent quelques murmures. La suite de ce qu’il avait à dire lui gagna les sympathies et le presque unanime consentement des auditeurs.

Pour venir à bout de l’œuvre entreprise, croit-on que de bons modèles soient l’élément principal ? Non. Il est nécessaire que le beau, sous le plus de formes possible, soit exposé aux regards, qu’on répudie les images sans aucune valeur, les livres à reliure de clinquant, les mauvaises gravures. La laideur et la barbarie des images n’ont que de trop pernicieux résultats. Le bon marché n’en compense pas le mauvais effet, car ces objets sont des collections d’art pour tant de gens qui n’en verront guère d’autres. N’y aurait-il pas lieu d’essayer d’organiser dans tous les villages, à l’école, un petit musée fort élémentaire d’art industriel, ne fût-il composé que de quelques œuvres choisies, même de reproductions photographiques ? Les donations volontaires formeraient la première mise, le reste viendrait après ; mais le local, dira-t-on ? Ce serait le parloir ou quelque endroit couvert. Le président du congrès, M. de Lajolais, résume quelques points du discours qu’il avait prononcé à Bruxelles. Il n’y a pas pour lui deux arts, l’un industriel et secondaire, l’autre supérieur. L’art est un. C’est par la base qu’on commencera l’éducation qui importe à tous. Elle sera large, synthétique, simple. Là-dessus on édifiera plus tard. On pèsera sur les écoles normales, afin que l’étude du dessin y ait une meilleure place. Apprendre à voir avec l’œil du dessinateur, ce n’est pas si peu de chose. Multiplier l’observation en la rendant attrayante, faciliter la connaissance de la forme, montrer les transformations qu’elle subit quand on la change de place, quand on en modifie la position, faire transporter sur une surface plane l’image d’un solide, tel est le premier objet en vue, le but à atteindre.

Le congrès a remis le soin de formuler les résolutions de cette séance à une commission qui a été très habilement présidée par. un des membres étrangers, M. Canneel. Cette commission, a donc déclaré qu’il importe d’abord, dès la première enfance, de développer